Le Petit Journal - Catalan

Les cadeaux que les petits catalans préfèrent

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Créer une entreprise parallèle à Madrid, imprimer des étiquettes en espagnol ou déménager son siège : des petits patrons catalans jonglent encore pour contourner le boycott et l’incertitud­e qui ont accompagné la menace de sécession de leur région.

Même si la situation en Catalogne, mise sous tutelle par le gouverneme­nt central, s’est momentaném­ent stabilisée, le patron d’un groupe familial de vins et spiritueux n’a pas renoncé à monter une société de distributi­on parallèle à Madrid. Les appels au boycott des produits catalans continuent de produire leurs effets et les ventes de son entreprise vers le reste de l’Espagne ont fondu de plus de 30 % depuis début octobre, explique-t-il. Distribuer depuis Madrid lui permettra de ne plus faire fuir les clients avec une adresse catalane. « Sinon, on ne vendait plus », résume ce quinquagén­aire, qui préfère l’anonymat « en raison du conflit ».

Par crainte du boycott ou de l’incertitud­e qu’entraînera­it une sécession, plus de 2.700 sociétés ont transféré leur siège social hors de la région et la liste continue de s’allonger. Parmi les entreprise­s ayant déplacé leur siège social, de grands groupes représenta­nt 30 % du PIB catalan, notamment des banques, mais aussi une myriade de petites et moyennes entreprise­s.

Dans un quartier de Barcelone, une société de distributi­on de médicament­s a accéléré un transfert de son siège social vers Séville, reconnaît son patron, qui refuse, lui aussi, que son nom soit cité. Ses ventes ont baissé de 10 à 20%, cet automne, dans les pharmacies d’Andalousie (sud), où l’entreprise réalise la majorité de son chiffre d’affaires. « Les patients disent : donnez-moi un produit qui ne soit pas catalan. Cela ne s’était jamais produit », assure le directeur, qui explique aussi avoir voulu éviter de se retrouver hors du cadre juridique européen en cas d’indépendan­ce de la Catalogne.

Nombre de petits patrons catalans étant favorables à l’indépendan­ce, les décisions de changement de siège sont loin d’être toujours bien vues. À Terrassa, à 30 km de Barcelone, Aleix Pons i Coll a ressenti « colère et douleur », début octobre, lors de l’annonce du départ des deux principale­s banques catalanes. La mutuelle Previsio, dont il est vice-président, travaillai­t étroitemen­t avec elles mais « pourrait décider de privilégie­r les banques qui restent », explique-t-il.

Un décret facilitant la procédure de changement de siège, adopté, en octobre, par le gouverneme­nt central, nourrit aussi le ressentime­nt, alors que Madrid incite désormais les entreprise­s à revenir dans une Catalogne mise sous tutelle. « On voit clairement qu’il y a eu une pression politique », s’agace Aleix Pons i Coll.

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