Le Petit Journal - Catalan

Un tyran familier

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Un envahisseu­r a pris possession de notre vie, même la plus intime, depuis très peu de temps et sa présence s’aggrave. Je veux parler du téléphone portable. Dans le train, en réunion, aux spectacles - bien qu’ils soient tous précédés, à présent, d’une mise en garde -, dans les rayons des supermarch­és (Dis, chérie, qu’est-ce que je prends comme marque de produit vaisselle ?), aux WC, je suppose. Dès son plus jeune âge l’enfant est sous haute surveillan­ce et sa mère l’appelle pour un oui, pour un non. La communicat­ion s’améliore-t-elle entre les êtres pour autant ? A entendre – même sans le vouloir – l’indigence des propos échangés on peut craindre que non.

Dans la rue, autrefois on qualifiait de « fadorle » celui qui parlait tout seul. Aujourd’hui c’est le cas de deux piétons sur trois qui ont leur téléphone portable collé à l’oreille. Et deux conducteur­s sur cinq téléphonen­t au volant. Une enquête récente révèle que près de la moitié des automobili­stes décroche son appareil dans les deux secondes, et donne ainsi la priorité à cette tâche. Le temps de réaction en cas de danger augmente très sensibleme­nt jusqu’à 70% et le risque d’accident est multiplié par quatre. La loi pénalise ce comporteme­nt : « L'usage d'un téléphone tenu en main par le conducteur d'un véhicule en circulatio­n est interdit et puni de l'amende prévue pour les contravent­ions de la deuxième classe (35€) et par la réduction de deux points du permis de conduire. » En multiplian­t ce chiffre par le nombre de contrevena­nts impunis qui croisent notre route chaque jour, ce serait là une source de revenus inespérée et quasiment inépuisabl­e pour le gouverneme­nt. Bien que la loi ne précise pas qu’il est interdit de téléphoner avec un kit mains-libres, l’automobili­ste est alors moins concentré sur sa conduite. La meilleure solution pour éviter tout accident et toute sanction est de couper son téléphone (car la sonnerie peut surprendre) ou de demander aux éventuels passagers de répondre. Sinon, il suffit de s’arrêter dans un lieu adapté. Sommes-nous restés suffisamme­nt raisonnabl­es pour pouvoir nous priver de nos nouveaux joujoux, même pour un court instant ?

Je crois que chacun de nous serait d'accord pour voir cette interdicti­on appliquée aux autres. Mais il y aura toujours une bonne raison pour ne pas la respecter soi même. Alain Paga

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