Le Petit Journal - du Tarn-et-Garonne

Elles crient leur innocence

Procès des assistante­s du Tribunal de commerce de Montauban accusées de détourneme­nt de fonds

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Dans notre édition du 2 mars nous avions couvert l’affaire de détourneme­nt de fonds au Tribunal de Commerce de Montauban. Les deux prévenues Fabienne T. et Liliane V. sont accusées suite à des “anomalies dans l’arrêté des comptes”. La délibérati­on du tribunal a été renvoyée au 28 mars prochain “pour se donner un temps de réflexion”, nous avait expliqué Maître Mouton, avocat de la défense, pour une enquête qu’il considère “totalement à charge”. Suite à l’ampleur de la couverture médiatique qu’a pris cette affaire, Fabienne et Liliane ont accordé au Petit Journal une interview exclusive. Vous avez souhaité revenir vers la presse concernant cette affaire, que s’est-il passé?

Nous avons été convoquées le 28 février 2017 à l’audience du Tribunal et nous avons toutes deux été très heurtées par la couverture médiatique qui nous a d’ors et déjà condamné. Parmi les points qui nous ont énormément choqué, certains titres où nous pouvions lire

Je tiens à préciser que nous ne sommes que salariées. On y fait aussi état “d’une plainte pour harcèlemen­t contre l’employeur” alors que c’est totalement faux. Enfin, on nous accuserait presque

ce qui sous-entend notre culpabilit­é. Je tiens donc à rappeler que nous plaidons non-coupable dans cette affaire.

Vous semblez questionne­r les accusation­s, qu’est ce qui vous perturbe dans la procédure?

Nous avons été surprises avec ma collègue lorsque nous avons été convoquées le 21 mars 2016 dans le bureau de Mme la greffière. Nous avons été soupçonnée­s de vol, et cette dernière nous a indiqué qu’elle allait porter plainte auprès du procureur. Notre surprise vient du fait que nous n’avons jamais été les seules à manipuler des espèces au Tribunal de Commerce. L’ensemble du personnel peut être amené à en manipuler, et il nous arrivait très régulièrem­ent de donner les enveloppes à Mme la greffière via des collègues qui descendaie­nt au rez-dechaussée. Il faut savoir que la caisse est un simple tiroir à crayons où n’importe qui peut y accéder. Concernant les ordinateur­s, c’est la même chose, tout le monde y a accès, et nous avons donc été très surprises que l’ensemble du personnel ne soit pas convoqué ou cité dans la soi-disante plainte contre X. Nous sommes aussi les deux seules à avoir été placées en garde à vue.

Suite à l’entretien avec la greffière, et maintenant la séance au tribunal, vous avez été mises à pied?

Nous somme très étonnées de voir un employeur qui soupçonne des salariées de vol, sans implémente­r de mise à pied. Un point sur lequel même l’inspection du travail nous a rejoint, puisque Mme la greffière ne nous a pas suspendues, et ce malgré notre arrêt maladie qui ne fait pas office de suspension. Une mise à pied aurait paru logique puisqu’elle nous accuse de vol, ce qui n’est pas rien dans un tribunal de commerce. Cela fait maintenant un an que sommes arrêtées par nos médecins, mais nous n’avons toujours pas été suspendues, ou même sanctionné­es.

Vous avez mentionné un amalgame de service, qu’entendez-vous par cela?

Nous travaillio­ns toutes les deux dans le même bureau mais pas dans le même service. Il faut savoir que Fabienne est au service procédures collective­s et moi au service contentieu­x. Aujourd’hui, malgré qu’on nous reconnaiss­e 6 écritures, à peu près 3600 euros, et Fabienne, la différence, nous sommes toutes les deux accusées pour la même chose. La seule différence étant la demande de prison avec sursis du procureur qui diffère de 4 mois. Pourquoi cet amalgame de service? Cela donne vraiment l’impression qu’on en veut à deux individus en particulie­r. Si de l’argent avait vraiment disparu, je pense que tout le greffe aurait dû être interrogé et vivre ce que nous avons vécu toutes les deux.

Votre avocat a aussi fait état d’ambiguïtés au niveau des montants, vous les contestez?

Au niveau des montants, il était toujours demandé une provision de 600 euros pour frais de procédure pour les redresseme­nt judiciaire­s et les sauvegarde­s. Or, les médias ont indiqué 94 écritures fausses, alors que 94 par 600 ne font que 56 400 euros. Ce sont toujours des sommes rondes, or là, on nous réclame 75 589 euros. Nous ne comprenons vraiment pas ces sommes. En outre, cela correspond au années 2013 à 2016, alors que les bilans 2013 et 2014 ont été approuvés par l’expert comptable.

L’enquête de personnali­té a révélé des problèmes d’endettemen­t, étaient-ils liés à cette affaires?

Fabienne: Oui c’est vrai, j’étais en surendette­ment depuis 10 ans et j’ai terminé les règlements en janvier 2016. Si j’avais vraiment pris de l’argent, cela m’aurait au moins permis d’anticiper le règlement de mon plan de surendette­ment.

Liliane: J’avais aussi quelques difficulté­s de surendette­ment, mais celles-ci ont été réglées en 2012, avant la période d’accusation.

Durant la séance au tribunal, un conflit salarial a aussi été révélé, vous pensez qu’il y a une relation?

Le conflit salarial au sein du greffe a débuté depuis longtemps puisqu’en juin 2014 nous étions convoquées dans le bureau de la greffière pour nous indiquer que nous ne pourrions jamais être nommées greffières. Cela en sachant que Fabienne et moi-même étions les plus anciennes. Au moment des entrevues annuelles pour l’évolution des postes, on nous a indiqué qu’il ne pourrait y avoir de nomination, ni de commis-greffier, ni de technicien. La raison que l’on nous a donné à l’époque était la petite taille de ce greffe. Seulement, 6 mois plus tard nous apprenons, par des bruits de couloir, qu’une de nos collègues est nommée commis-greffier et technicien­ne, et cela alors qu’elle n’avait que 6 ans d’ancienneté et n’avait pas encore été formée. Nous avions toutes deux à la fois plus de compétence­s et d’ancienneté. C’est une nomination que nous avons très mal vécu puisqu’elle n’était pas juste. Depuis un an nous nous battions avec Maître Crapoulet pour être reconnues et obtenir au moins le même salaire. Nous ne l’avons jamais obtenu.

Quelle était la réaction de Mme la greffière face à ces demandes d’augmentati­on?

Elle nous disait qu’on verrait ça le mois prochain, elle mettait énormément en avant la loi Macron, qui soidisant allait lui faire perdre une partie de ses revenus. Elle nous parlait même de déposer le bilan. En réalité, on nous noyait un peu le poisson au fil des mois. Concernant la formation, c’était tout autant similaire puisque tout le personnel y a eu accès à part nous. Nous avons toujours été mises à l’écart dans l’évolution de nos carrières.

Un dernier mots?

Cette affaire nous a atteint physiqueme­nt et moralement. Nous sommes en dépression et nos familles en ont aussi beaucoup souffert. Je ne souhaite à personne de vivre une expérience pareille.

Cette presse nous accuserait presque “d’avoir nié jusqu’au bout”, ce qui sous-entend notre culpabilit­é. Nous travaillio­ns toutes les deux dans le même bureau mais pas dans le même service

Si de l’argent avait vraiment disparu, je pense que tout le greffe aurait dû être interrogé

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Suite à l’ampleur qu’a prise cette affaire, Fabienne et Liliane ont accordé au Petit Journal une interview exclusive : « Nous avons toutes deux été très heurtées par la couverture médiatique qui nous a d’ores et déjà condamnées. »
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Fabienne T. et Liliane V. attendent désormais la délibérati­on du 28 mars

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