Trafic de drogue: le conducteur mis en joue sur l’a20

Sous les yeux ahuris des autres automobilistes

Nous sommes le samedi 23 janvier 2016. Par cette froide journée d’hiver, une voiture avec un homme seul à son bord est stationnée sur l’aire de repos de l’autoroute A20 à Montpezat de Quercy. Rien de bizarre à cela.

Tout à coup, une scène digne d’un épisode de Starsky et Hutch se déroule sous les yeux ahuris des autres automobilistes. Certes, les trois voitures qui arrivent dans un crissement de pneus ne sont pas des Ford Gran Torino au rouge carmin, mais bien ceux, plus modestes mais tout aussi efficaces, du service des douanes françaises et viennent encadrer le véhicule à l’homme seul. Tel un diable sortant de sa boîte, les gabelous surgissent de leurs véhicules et mettent en joue le conducteur qui, devant un tel déploiement de force, n’oppose aucune résistance. Commence alors la fouille et là, c’est jackpot ! Ils découvrent non dissimulés sur les sièges arrière, 700 grammes de résine de cannabis (shit) et 225 grammes de MDMA, une nouvelle drogue de synthèse qui fait des dégâts irréversibles dans les cerveaux des utilisateurs. Charles, le prévenu qui vit en Corrèze, est immédiatement placé en garde à vue et va devoir donner aux enquêteurs quelques explications concernant sa possession d’une telle quantité de drogue. Il va avouer qu’il est lui-même consommateur. Le dealer montalbanais qui lui vendu la came, il l’a rencontré quelques temps auparavant à Brive par le biais d’une connaissance commune. Appâté par les tarifs très concurrentiels proposés, il lui a passé commande. La transaction a eu lieu le jour même, près de la gare de la cité d’ingres.

Sur l’identité du pourvoyeur, Charles préférera garder le silence. Les investigations menées sur les correspondances téléphoniques, ne permettront pas d’en savoir plus, le dealer utilisant un téléphone à carte prépayée. C’est à peu près tout ce qui ressortira des procès verbaux d’audition. Sur la personnalité de Charles, la cour va en savoir un peu plus. Il a 44 ans et a été militaire pendant deux décennies. Non sans une certaine fierté il appuie “J’ai servi mon pays pendant 20 ans et j’ai formé les meilleurs tireurs d’élite de l’armée de terre. ” Comment un sergent chef, brillant sous-officier de carrière devant bientôt être promu adjudant, en est-il arrivé là ? L’amour mon capitaine ! Un divorce difficile et c’est la chute ; il démissionne de l’armée et trouve un peu de réconfort dans la drogue. Des rapports conflictuels avec son ex qui lui empêche de voir son fils de 15 ans lorsqu’il en a la garde, ne font qu’empirer les choses. Et de la chute, on passe à la dégringolade. Les débats se recentrent sur les faits, et sur le paiement de la marchandise, qui selon les enquêteurs, aurait pu rapporter entre 20 000 et 30 000 euros à la revente au détail. Charles avoue avoir versé cash les 2 400 euros qu’il venait de gagner au tiercé, et qu’il devait payer le reste plus tard. La procureure s’interroge “Bizarre que des gens que vous connaissez à peine vous fasse des tarifs en dessous des prix marché et vous fasse crédit. ”

Ce à quoi il répond “Il y a beaucoup de choses bizarres dans ce dossier, et en premier lieu mon arrestation. ” Il sous-entend par-là qu’il aurait sans doute été “balancé.” Mais là n’est pas le sujet, et le réquisitoire se poursuit “De telles quantités sont incompatibles avec une consommation personnelle. Nous sommes là en présence d’un trafic avéré ! Je vous demande de le condamner à 24 mois d’emprisonnement dont 12 avec sursis. ” S’étant présenté sans avocat, le prévenu se défend et parle de la douleur engendrée par l’absence de tout contact avec son fils, du suivi qu’il a entamé avec un addictologue, des 5 mois de détention préventive qu’il a effectué de janvier à juin 2016 qui lui ont imposé un sevrage et permis de faire le point. Ses dernières paroles seront “En deux ans et demi, un homme avance et peut faire du chemin. ” Verdict : 18 mois dont 6 avec sursis avec obligation de soin, de travail et de formation.

(photo d’illustration)