Le Petit Journal - du Tarn-et-Garonne

L’argent ne dort pas toujours sous le matelas

Travail dissimulé et blanchimen­t en famille

-

Trois personnes, unies par des liens familiaux et la même répulsion pour les démarches administra­tives, sont poursuivie­s pour des faits de travail dissimulé et blanchimen­t aggravé.

Il y a Alain, à l’approche de la cinquantai­ne, celui que l’on pourrait désigner comme le cerveau. Son neveu et bras droit, Tony, tout juste 30 ans, et l’ex-compagne de ce dernier, Charlotte, 27 ans. Juillet 2013, dans le cadre d’une toute autre affaire, les gendarmes perquisiti­onnent un hangar loué par la société d’alain à Bressols. A leur grande stupéfacti­on, ils trouvent un entrepôt rempli de matelas et de petit mobilier, neufs, encore emballés sous plastique, une marchandis­e estimée à plus de 100 000 euros. En poursuivan­t leur fouille, ils découvrent un bureau avec un ordinateur, des cartes de visite au nom de Tony faisant état de 2 autres entrepôts, 5 000 euros en liquide et surtout 173 chèques pour un montant de 133 000 euros. Intrigués par de telles découverte­s, les pandores ouvrent une enquête préliminai­re, creusent un peu plus loin et, ô surprise, le hangar n’est répertorié nulle part. Forts de ces éléments probants, le parquet leur délivre une commission rogatoire afin de mener des investigat­ions bancaires. Celles-ci vont démontrer que sur les 12 derniers mois, Alain a utilisé 10 comptes bancaires sur lesquels ont été encaissés 72 000 euros, et surtout elles vont permettre de mettre à jour un fonctionne­ment particulie­r de la société, dans lequel les chèques passent de main en main comme du vulgaire numéraire. Le système, fort simple, était bien rodé. La société d’alain, comme il le reconnaît aisément, a une activité de semi-grossiste en matelas. Elle vend, souvent à crédit, à un réseau de détaillant­s et autres petites mains, qui eux vendent la marchandis­e à des particulie­rs.

Lorsqu’ils se font payer en chèque, l’ordre du bénéficiai­re est toujours en blanc. A partir de ce moment, les chèques vont faire le chemin inverse des matelas ; ils sont d’abord remis à Alain, qui lui même ensuite, les remet à ces fournisseu­rs portugais, espagnols ou italiens. La boucle est bouclée, et l’activité, elle, est bien cachée ! Chose, qui on l’imagine, sera peu appréciée par l’administra­tion fiscale et les organismes sociaux. A l’instar d’une affaire similaire récemment appelée devant le TGI, un homme absent va se retrouver au coeur des débats: le comptable, celui qu’a mandaté Alain, celui en qui il avait toute confiance et qui devait s’occuper de toutes les démarches fiscales et sociales de sa société. A priori, tout n’a pas été fait dans les règles de l’art ; mais la procureure Benlafquih ne se gênera pas pour rappeler que “Prendre un comptable qui n’en est pas vraiment un, relève du libre choix du chef d’entreprise. ” Fin de l’épisode comptable, la cour en vient à examiner le rôle de Tony dans le blanchimen­t ; il a encaissé sur son compte, 215 chèques pour un montant de 45 877 euros. Le neveu tente de s’absoudre de ce chef d’accusation, pour mieux s’auto-inculper de vol “Ces chèques, je les ai pris à mon oncle, j’en avais besoin. Je comptais le rembourser plus tard.” La présidente Maury l’interpelle “Plus de 45 000 euros s’évaporent et votre oncle ne s’en rend même pas compte ?” Sur le compte de Charlotte, 18 000 euros ont transité, et elle s’en explique “Tony me remettait les chèques ; il me disait qu’ils provenaien­t de son travail sur les marchés. ” L’affaire a été mise en délibéré au 7 août.

 ??  ??

Newspapers in French

Newspapers from France