Le Petit Journal - du Tarn-et-Garonne
Une longue série impressionnante de vols à la roulotte
Ils étaient bien rodés et peu scrupuleux...
Les statisticiens, ainsi que les hauts fonctionnaires de la place Beauvau aiment à scinder la délinquance en deux catégories, la petite et la grande, instillant ainsi dans les esprits le concept d’une délinquance sans importance en opposition à celle qui de par l’ampleur de ses actes nécessite une attention particulière. Ô certes, l’attaque d’un fourgon blindé à la kalachnikov est bien plus spectaculaire et plus médiatique qu’un cambriolage mené par un monte en l’air du dimanche. Mais pour les victimes, quelles qu’elles soient, il n’y a qu’une seule et indicible souffrance.
C’est bien ce qu’on a ressenti lors de l’examen de cette affaire concernant plus d’une quinzaine de vols à la roulotte commis par un tandem peu scrupuleux. Jean Noël et Nicolas sont plus proches de Laurel et Hardy que de Carbone et Spirito. L’un est grand, a passé la cinquantaine et on sent bien que certaines années ont du compter double, c’est Jean Noël ; l’autre est de taille moyenne et affiche 3 décades au compteur, c’est Nicolas. Jean Noël a été libéré il y a juste une semaine et porte un bracelet électronique. Nicolas est toujours incarcéré. Au printemps 2018, les gendarmes notent une recrudescence des vols à la roulotte dans le département, signe qu’une équipe s’est lancée dans cette activité délictueuse. Ils enquêtent, interrogent les témoins, et rapidement, les recoupements vont faire apparaitre une constante, la présence sur les lieux des vols d’une Séat Ibiza verte. Ce type de véhicule n’étant pas légion, ils vont vite avoir en main la courte liste de propriétaires en possédant une.
Dans celle-ci, il y a une vieille connaissance, Jean Noël. Des cartes bleues ont été volées et utilisées chez des commerçants ; poursuivant leurs investigations, les enquêteurs vont examiner les vidéos des caméras de surveillance. Et qu’y voientils ? Là aussi une vieille connaissance, c’est Nicolas. Et lorsqu’ils apprennent que Nicolas vit avec une nièce de Jean Noël, c’est le pompon, ils tiennent leur équipe ! Hélas, ils devront laisser la politesse de l’arrestation à leurs collègues du commissariat de Montauban, qui interpellent en flagrant délit le tandem le 28 mars. Placés en garde à vue, les deux hommes vont contester l’intégralité des faits malgré les preuves accablantes de leur implication, en particulier l’étude de la téléphonie qui révèlent que le bornage de leurs portables coïncident avec les lieux des vols. L’audience étant chargée, la présidente Maury ne veut pas y passer l’après-midi et poussent les prévenus dans leurs derniers retranchements. Nicolas, qui a reconnu 2 vols, ceux pour lesquels il a été filmé en train d’utiliser des cartes bleues dérobées, affirme laconiquement “J’ai du les faire. ” Jean Noël, qui lui aussi semble soucieux d’en terminer rapidement, finit par lâcher “J’avoue tout ! ” Ce qui va sans doute débrider son collègue qui dans la foulée reconnaît tous les faits. On y voit déjà plus clair. Cette première étape franchie, la présidente Maury va essayer de déterminer les causes et engage le dialogue, d’abord avec Jean Noël. “J’ai passé la moitié de ma vie en prison. Mais là depuis sept ans, je me tenais tranquille.”
”Alors pourquoi avoir repris?” “J’avais des problèmes de santé et j’étais en fin de droit de chômage.” Avec Nicolas ensuite. “J’étais dans une mauvaise passe.” “Une mauvaise passe qui dure, votre première condamnation remonte à quinze ans. ” “J’en ai marre de la prison, c’est pas la vie, la vie elle est dehors.” “C’est facile de ne pas y retourner, tenez vous à carreau. ” C’est l’heure de s’occuper des victimes ; quatre sont présentes dans la salle, deux autres se sont constituées partie civile par courrier et deux autres enfin se sont fait représenter par un avocat. Les demandes de dommages vont s’inscrire dans une fourchette de 100 à 3 500 euros selon les préjudices subis et les remboursements totaux ou partiels par les assurances. Jean Noël écope de 12 mois fermes, même peine pour Nicolas mais assorti de 4 mois sursis mise à l’épreuve de 2 ans. Plus une kyrielle d’indemnisations pour un total avoisinant les 5 000 euros.