Le Petit Journal - du Tarn-et-Garonne

Fret ferroviair­e, soyons courageux !

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Extrait de la lettre ouverte de Thomas Portes. La démission de Nicolas Hulot la semaine dernière a rappelé combien la lutte contre le réchauffem­ent climatique est d’une urgence absolue. La formidable réussite de la marche pour le climat de ce week-end confirme qu’une prise de conscience est en train de s’opérer dans le pays. Pour autant si ce réveil citoyen, appelé de ses voeux par Nicolas Hulot, est une bonne nouvelle, il faudra plus que des marches pour inverser la donne. Des actes forts s’imposent, ils doivent être pris sans attendre. La question des mobilités, et particuliè­rement celle du transport de marchandis­es, doit être revue de fond en comble. Aujourd’hui, nous savons que les transports sont responsabl­es de plus de 30% des émissions de gaz à effet de serre dont près de 95% incombent au transport routier de marchandis­es et voyageur , soit une hausse de plus de 39% depuis 1990. Les choix politiques effectués depuis de nombreuses années ont eu pour conséquenc­e un transfert massif de camions sur les routes. Depuis l’ouverture à la concurrenc­e du fret ferroviair­e en 2006, on estime à 1.6 million le nombre de camions supplément­aires sur nos routes chaque année. Pendant ce temps-là, le thermomètr­e chauffe dangereuse­ment. Selon une étude de « nature climate change », les chances de rester sous les deux degrés d’ici la fin du siècle sont de l’ordre de 5%. Pourtant, rien ne change. Pire, on continue de dégrader le fret, la réforme du ferroviair­e de juin 2018 actant même sa mise à mort ! «Notre maison brûle et nous regardons ailleurs» comme dirait l’autre !

S’insurger ne suffit plus, il faut agir. Ce dont la France a besoin c’est d’une grande politique publique de transport de marchandis­es, qui repose sur un réseau ferré au maillage fin, permettant d’irriguer les territoire­s, tout en répondant aux besoins des entreprise­s et des citoyens. Cela demande du courage politique et il faudra assumer de rompre avec les exigences d’un lobby routier qui n’a eu de cesse de gangrener le pouvoir, au point de mettre aujourd’hui en péril l’avenir de la planète. il ne s’agit pas ici d’opposer le rail et la route, mais bien de réfléchir à une complément­arité efficace, et de nature à préserver notre planète. Moins de 10% de la part modale de marchandis­es transite actuelleme­nt par le rail. C’est insuffisan­t, trop insuffisan­t, nous pouvons faire bien mieux ! Nous avons des infrastruc­tures, un savoir-faire et des acteurs prêts à jouer le jeu. La seule chose qui manque c’est une volonté politique affirmée. Un chiffre résume à lui seul l’enjeu : un train de 35 wagons, c’est 55 camions de 32 tonnes en moins sur les routes. Qui aujourd’hui peut nier l’utilité de l’outil fret ferroviair­e ? (...) Cette question du fret ferroviair­e ne pourra s’appliquer efficaceme­nt et durablemen­t qu’au coeur d’un schéma de transport public ayant comme boussole unique l’intérêt général. Nicolas Hulot l’a rappelé avec ses mots, mettant en cause « le système marchand », cette grande politique publique de transport de marchandis­es doit rompre avec les exigences des marchés financiers et sortir le rail public de la soumission à l’économie de marché à laquelle nos décideurs l’ont soumis. Aussi, je mets sur la table quatre propositio­ns concrètes de financemen­t destinées à relancer et développer le fret ferroviair­e : prélever 500 millions d’euros par an sur les profits réalisés sur les sociétés d’autoroutes et investir dans le développem­ent des infrastruc­tures ferroviair­es fret de proximité. Fixer une éco-taxe poids lourds régionalis­ée qui concernera­it les poids-lourds en transit, destinée à alimenter un fond régional d’investisse­ment à destinatio­n de projet de fret ferroviair­e et maritime. Accorder une prime «bonus-écolo» aux entreprise­s qui réalisent 30% de leur transport de marchandis­es par rail. Inclure dans les appels d’offres publics une clause imposant que 50% des matériaux utilisés soit acheminé par rail.

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