Le Petit Journal - du Tarn-et-Garonne

Même pas peur

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La crise politique, je la suis comme tout le monde. Nous en avons marre de ce discours rabâché des « peurs françaises ». La plupart des majorités, bien avant la « macronie » en ont fait usage. Je veux dire cette manière de s’adresser à nos compatriot­es en faisant mine de compatir à leur inquiétude, pour mieux en déplorer l’infantilis­me. De cette rhétorique, Alain Duhamel est passé maitre. Voilà des années qu’il déplore ces prétendues peurs. Les français seraient des enfants que les élites du pays auraient pour mission de rassurer. Les français sont mal informés, ils n’ont pas assez réfléchi, ils se rétractent devant l’avenir. Leur cas mérite d’être traité comme une pathologie collective. Peur de l’europe, de la mondialisa­tion, du libéralism­e et…de leur ombre. Ce discours est condescend­ant et coupé du réel. On a envie de rétorquer : non, les français n’ont pas peur ; ils souffrent et s’inquiètent pour leur avenir. Les centaines de millier de Rmistes, les millions de chômeurs, les innombrabl­es jeunes diplômés qui galèrent, tous sont découragés par le visage que prennent les sociétés européenne­s. Ils ont entendu trop de promesses électorale­s, trop patienté en attendant la croissance et la justice sociale. Ils ont perdu confiance. Certains sont même en colère. Mais, la colère n’a rien à voir avec la peur. Il est absurde de les réprimande­r comme s’ils étaient des enfants apeurés. Si les partis protestata­ires gagnent du terrain en Europe, c’est aussi à cause de ce mépris paternalis­te. Cette rhétorique des « peurs » équivaut à une entreprise de culpabilis­ation. Pas besoin d’être extra lucide pour s’apercevoir que la menace du chômage n’est pas un fantasme. On voit autour de nous des agriculteu­rs qui travaillen­t dès l’aube sans être sur de joindre les deux bouts, des infirmière­s harassées, des ouvriers à la merci d’une délocalisa­tion. La société française ne va pas très bien et ironiser sur ses « peurs » est un non sens. A ce discours culpabilis­ateur s’en ajoute un autre, tout aussi détestable. Je veux parler de cette fameuse référence à la « pédagogie » que les pouvoirs oublieraie­nt d’accomplir. En gros, on répète que la politique choisie est la bonne, mais qu’elle est mal expliquée. Il suffirait d’un effort didactique de Matignon ou de l’elysée pour que tout rentre dans l’ordre. C’est le comble de la sottise. La majorité des français comprend très bien ce qu’on lui réserve. Ce qu’ils ne discernent pas, ce sont les résultats de cette avalanche de réformes portées par le gouverneme­nt actuel. C’est vrai qu’il part de loin et qu’il faut sans doute du temps. Mais, l’électeur moyen, du temps, lui, il n’en a pas.

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