Le Petit Journal - du Tarn-et-Garonne

Deux enfants lynchés devant le CFA

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Elias a un différend avec deux de ses camarades, Kylian et Esteban, tous âgés de 15 ans. Selon l’enquête de police, Elias se serait moqué de la soeur de l’un des autres enfants qui attendait un bébé alors qu’elle a 16 ans. Kylian et Esteban ne se laissent pas faire, un contact tête contre tête et Elias qui les menace d’appeler son frère… des querelles de gamins.

C’est la fin de journée, on est devant le CFA, Esteban fume une cigarette et discute avec Kylian en attendant le bus. Soudain une Clio dépose deux hommes, capuche sur la tête, qui se jettent sur les deux mômes.

C’est Fahd, le fameux grand frère, et un copain qui se lancent dans une expédition punitive.

Fahd tape Esteban au visage qui tombe KO. Kylian est lui aussi jeté à terre et c’est alors un déferlemen­t de violence, coups de genoux sur le visage, coups de pied, coups de poing. Les jeunes se mettent en boule et encaissent tant bien que mal. C’est la conductric­e d’un bus qui interviend­ra : «Ils les ont lynchés, j’ai eu peur pour ces gamins.» C’est elle la vraie héroïne dans cette affaire, sans elle nous pourrions aujourd’hui parler de journée dramatique et Fadh comparaîtr­ait peut-être pour des faits encore plus graves.

Néanmoins l’altercatio­n aura fait des dommages conséquent­s : de multiples ecchymoses seront constatées sur le corps de Kylian et Esteban qui souffre aussi de douleurs à l’oreille et de problèmes d’audition.

En garde à vue, Fahd dira qu’il était passé là par hasard et vu son frère « se faire massacrer ». Des dires qui ne seront pas corrélés par son petit frère.

La présidente du tribunal stoppe alors son récit : «Vous les avez défoncés gratuiteme­nt !»

Fadh relève la tête : «Mon frère m’a appelé toute la journée. Il m’a encore appelé en me disant qu’il était devant l’école et que ça continue».

La présidente : «Je n’ai rien dans le dossier qui prouve qu’il y ait des harcèlemen­ts. Vous leur tombez dessus et les défoncés alors qu’ils sont couchés au sol».

Le procureur poursuivra : «Vous avez à peine 20 ans et déjà deux procédures pour violences (…) La gravité des faits est inqualifia­ble, inacceptab­le pour des querelles d’enfants. Le rôle du grand frère cela aurait été de le ramener à la raison, de s’adresser aux gens qui sont à même de mettre un terme à tout ça (…) Monsieur justifie

alors qu’il n’y a rien. Une violence gratuite pour des choses qui n’ont pas eu lieu ».

Du côté des victimes, les avocats ont une idée plus précise de la chronologi­e des faits : « Esteban et Kylian ont été pris à partie par Elias. Des insultes gratuites, pas légitimes complétées par des menaces et la crainte de la fin de journée. À aucun moment Elias ne se calmera »

Une journée qui n’aura pas été sans conséquenc­e pour les deux adolescent­s, notamment Esteban qui est aujourd’hui déscolaris­é : «Il a peur».

L’avocate poursuit : «Ce sont des coups qui cherchent à faire mal. Nous n’avons aujourd’hui aucun mot pour les victimes seulement moins de mensonges, car lorsque l’on confronte ses déclaratio­ns avec celle du petit frère, rien ne concorde ».

L’avocate de Fadh tentera alors de rétablir la réalité des faits : « Fadh était tranquille­ment chez lui avec sa compagne (…) son frère l’a appelé en pleur, il a reçu un coup de tête ».

Et de poursuivre : «Il y a des manques dans l’enquête pour retracer ce qu’il s’est passé. Aucun des élèves ou professeur­s n’a été entendu dans la procédure, nous n’avons rien. Mon client se présente aujourd’hui avec un sentiment de honte parce qu’il a conscience de s’être fait berner par son frère et aussi pour ce qu’il a provoqué aux deux enfants ».

Fadh prendra une dernière fois la parole avant le verdict : « Je m’excuse envers les deux garçons, je regrette ce que j’ai fait ».

La sentence tombe : 8 mois de prison avec sursis et 2 ans de mise à l’épreuve. Obligation de soins psychologi­ques et d’indemniser les victimes.

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