Le Petit Journal - du Tarn-et-Garonne
«Tirons les 1ères leçons de la crise !»
Il aura malheureusement fallu une crise sanitaire inédite et tragique pour que la place stratégique de l’agriculture française soit appréciée à sa juste valeur.
Je constate incrédule que les agriculteurs sont aujourd’hui aux yeux de la population et surtout des pouvoirs publics les pièces maîtresses, le premier maillon d’une chaîne alimentaire indispensable à la survie de l’espèce humaine comme à l’économie nationale.
Hier encore, nous étions conspués, stigmatisés, renvoyés sans ménagement aux bancs des accusés !
Hier encore, nous étions les pires des pollueurs, les 1ers empoisonneurs, les plus grands massacreurs d’animaux, nous étions ceux qui empêchaient les charmants citadins de savourer les joies paisibles d’une campagne figée. Eh oui, le coq chante, la vache pète, le stockage de l’eau et l’irrigation des sols sont indispensables pour amener une culture à son terme ! Qui oserait encore s’en plaindre ? Certainement pas les millions de personnes qui guidé par un instinct de survie ont déserté mi-mars les grandes villes pour se réfugier à la campagne !
Aujourd’hui, à l’heure de la crise du coronavirus et de la fermeture des frontières, la donne a complètement changé ! Il semble que la France prenne enfin conscience de la nécessité d’avoir des agriculteurs en nombre suffisant capables d’assurer une production nationale diversifiée à la hauteur de leurs besoins alimentaires. Nous sommes la deuxième
ligne, cette base arrière qui quelles que soient les époques, les guerres ou crises traversées, a toujours répondu présente pour assurer sa « mission nourricière ».
« La grande armée de l’agriculture », silencieuse et au labeur, est une fois de plus au rendez-vous de l’histoire. Un agriculteur ne se confine pas ! On ne lui demandera jamais de s’arrêter de travailler tant son métier est essentiel à la survie de tous.
Pour surmonter cette crise sanitaire et humaine, nous avons besoin de solidarité, d’entraide. Soyons responsables, constructifs, bâtisseurs et laissons l’individualisme, les petites stratégies et récupérations politiciennes derrière nous.
Cette expérience doit nous faire prendre conscience que toutes les formes d’agriculture
ont leur place dans un contexte où il est question de la souveraineté et de l’indépendance alimentaires de notre pays ! La qualité mondialement reconnue de l’agriculture française retrouve grâce aux yeux du consommateur, et c’est tant mieux ! Pour preuve, l’engouement suscité par les circuits-courts et en particulier le « drive fermier 82 ». Pour preuve également le succès rencontré par le marché-interprofessionnel organisé tous les mardi et vendredi sur le site de la Ferme de Bexianis à Montbeton.
Cette expérience doit nous faire prendre conscience que nous sommes la clé de notre avenir. Le succès du marché de Bexianis réside aussi dans la capacité des producteurs à se regrouper et à regrouper l’offre pour mieux dicter leur prix…un prix qui rémunère ! Ne sous-estimons pas cette force de frappe !
Ce nouveau marché de Bexianis, en lien avec la création d’un atelier de découpe, doit nous conduire à proposer dès demain un plan d’alimentation territorial pour ouvrir de nouvelles perspectives de débouchés, à commencer par des circuits de proximité et des productions payées à leur juste valeur, y compris à l’export. La Chambre d’agriculture, la Fdsea et les JA de Tarn-et-garonne y travaillent déjà.
L’enjeu de structuration territoriale est incontestablement l’une de nos priorités. C’est un des leviers que nous pouvons – et devons - nous-mêmes actionner !
L’autre enjeu majeur de demain, sur lequel nous n’avons pas vraiment la main, c’est la
nouvelle PAC. Sur ce point, nos dirigeants devront se souvenir que l’agriculture française et européenne est une arme de guerre mondiale. A l’instar de la santé, notre agriculture n’a pas de prix, mais elle a un coût.
Ce cout, c’est celui de la qualité et de la sécurité alimentaire de nos produits, garants d’une traçabilité irréprochable. Les agriculteurs français, quoi qu’on en dise, sont exemplaires en la matière, avec des critères d’exigence bien supérieurs aux autres pays et notamment à leurs voisins européens.
Ce cout, c’est aussi celui de la main d’oeuvre et des charges sociales plus élevées en France qu’ailleurs, qui génèrent une concurrence déloyale (sans oublier
la sur-administration très franco-française et toute sa paperasse !).
Saluons le travail remarquable, tant il est précieux, des milliers de salariés agricoles, quelle que soit leur origine, qui
font vivre nos exploitations depuis 10, 15 voire 20 ans et plus. Leur fidélité et leurs compétences agricoles sont indispensables à la survie de nos exploitations. Car on ne s’improvise pas agriculteur ou salarié agricole du jour au lendemain. Cela demande une formation, une expérience et une connaissance poussée du métier. Aurait-on pu imaginer un appel citoyen, sans connaissance prérequise, à la « grande armée de l’aviation » ou « la grande armée de la médecine » ?
En Tarn-et-garonne, premier verger de France, le recours aux salariés agricoles d’origine étrangère, fidèles depuis des décennies et opérationnels immédiatement, est non négociable ! Nous avons besoin d’eux et de leur connaissance fine du métier.
Je remercie tout spécialement les personnels de la Chambre d’agriculture, de la FDSEA, des JA et d’elvéa 82 qui restent pleinement mobilisés à nos côtés dans cette période difficile.
Enfin, mes derniers mots iront tout droit aux combattants de la 1ère ligne (médecins, infirmières, aides-soignantes, aides à domicile, ambulanciers, sapeurs-pompiers, policiers, gendarmes, employés de la petite, moyenne et grande distribution, etc…). Un grand MERCI à eux !