Le Petit Journal - du Tarn-et-Garonne

Son collègue boit, il perd son bras

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À 42 ans, Julien vient de « foutre en l’air » la vie de son ancien collègue âgé de 27 ans. Il en a pleinement conscience et mesure toute la bêtise de son acte. Les faits remontent à septembre dernier, alors que tous les deux poursuiven­t leur tournée au volant d’un des poids lourds de l’entreprise Michel Weill.

C’est Julien qui conduit le véhicule, mais ce jour-là il est très fatigué après avoir festoyé la veille bien au-delà du raisonnabl­e. Il navigue un peu dans le brouillard et cherche un moyen de retrouver ses esprits, c’est alors que lui vient l’idée surprenant­e de prendre une bière : « je pensais que cela allait me donner un coup de boost ». Les passionnés de cyclisme connaissen­t tous l’histoire d’anquetil décroché dans un col des Pyrénées par Poulidor après avoir fait la fête la veille et qui a remonté son retard après que son directeur sportif ait mis du champagne dans son bidon. Mais ceci n’est qu’une légende, il est fort probable que Gémiani lui avait donné un cocktail dont lui seul connaissai­t le secret, il avait d’ailleurs dit : « Ça le remonte ou ça le crève ».

Combattre le mal par le mal n’a jamais été une solution. Bien sûr, Gaëtan aurait pu prendre le volant, sauf qu’il apprend le métier, il devait signer un CDI dans 3 jours et venait juste de passer le permis PL, mais n’avait pas reçu le papier, il préfère donc rester passager.

Les deux hommes quittent donc la place de Saint-sardos, Julien demande à Gaëtan de prendre le GPS pour le guider et le camion prend la route, il est 13 heures passées. Ils n’iront pas bien loin, dans un virage, alors que la vitesse est limitée à 50 km/h Julien ne freine pas, sort de la route, le poids lourd percute le talus à plus de 60 km/h et se renverse. Le choc est violent, les deux hommes sont inconscien­ts. Gaëtan sera le premier à se réveiller, il rampera pour s’extraire de la carcasse, son bras droit ne répond pas, ni sa main d’ailleurs. On imagine son état de détresse quand il ira chercher de l’aide auprès d’une maison voisine.

Désormais il a tout perdu, son emploi et un bras. 9 mois après les faits, son état ne s’est toujours pas amélioré, devant les juges il témoigne, tenant son bras droit avec sa main gauche : « Quelques jours auparavant, son chef l’avait averti de ne pas boire, il avait l’habitude de prendre un apéro tous les jours ». Gaëtan est retourné chez sa mère où il vit avec 500 € par mois : « il ne peut plus rien faire » indique son avocat qui pointe les conséquenc­es de l’alcool au volant « c’est un jeune homme marqué physiqueme­nt et psychologi­quement ».

Les circonstan­ces de l’accident sont établies, Julien a probableme­nt dû s’endormir au volant : le prévenu ne cherche pas à fuir ses responsabi­lités « Que ce soit limité à 50 km/h ou plus, ce n’est pas la question, j’arrivais trop vite dans le virage, c’est sûr (…) Après avoir quitté la place, je ne me rappelle de rien ».

Quant à l’alcool, il est bien sûr le premier responsabl­e puisque Julien accusait 0,89 mg d’alcool par litre d’air, soit environ 1,8 mg/l. de sang et son casier ne plaide pas en sa faveur avec trois mentions pour conduite sous l’emprise de l’alcool entre 2003 et 2014. Cela faisait tout de même 5 ans que l’on n’avait plus entendu parler de ses vieux démons.

Julien n’est pas un gars méchant comme en témoignera son avocate : « C’est notre Forest, il est gentil. C’est quelqu’un de fragile. Il ne conteste pas les faits et, de sa propre volonté, il voit un médecin une fois par mois ».

Dès lors, dans ce genre de procès, la prise de parole de l’assureur parait froide. Même si elle est dans son rôle, on reste toujours mal à l’aise quand l’avocate demande de réduire les indemnités dues à Gaëtan de 5000 à 3000 €.

Autant dire que la sincérité de Julien en fin d’audience « J’accepte, je suis responsabl­e. Mes pensées vont vers Gaëtan » ne feront que conclure des débats bien futiles aux yeux de Gaëtan qui quitte la salle sans un regard pour son ancien collègue, impassible, abattu ou en colère ? On peut le comprendre, tout ceci lui fait une belle jambe.

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