Le Petit Journal - du Tarn-et-Garonne
LA BATAILLE DES AGRICULTEURS
Les gelées des 6 et 7 avril ont durement frappé les productions du département, en particulier chez les arboriculteurs et les viticulteurs.
Le gel a frappé le Tarn-et-garonne dans les nuits de mardi à mercredi et mercredi à jeudi. Les grands moyens ont été employés pour tenter de sauver la récolte. La bataille du gel a duré toute la nuit de mardi à mercredi et la guerre n’était pas finie car des nouvelles du front n’étaient pas bonnes pour la nuit prochaine, où des températures négatives étaient à nouveau annoncées.
Viticulteurs et arboriculteurs ont dû déployer tout un arsenal pour tenter de sauver leurs parcelles du gel mortel. Pas question de rester les bras croisés. Il ne faut pas être résigné et nos agriculteurs ne le sont pas. Loin de rester dans leur lit, ils se sont retroussés les manches alors que tout est en train de se jouer maintenant. Le froid pique les doigts et ils sont sur le pont. Un à un, ils allument les bougies, que l’on appelle aussi chaufferette ou braseros, tous les 5 ou 10 mètres selon les parcelles. Ailleurs, on met le feu à des bottes de paille. Le spectacle de ces petites lumières dans la nuit glaciale est saisissant.
Ça va se consumer et ensuite ça créera un écran de fumée. L’idée, c’est d’empêcher la gelée blanche qui apparaît au lever du soleil avec le rayonnement et l’humidité. L’air se refroidit à ce moment-là, on essaie d’éviter que la température chute d’un coup. On espère aussi que le désherbage réalisé aura permis de limiter l’humidité dans les rangs. Mais contre la gelée noire, celle qui brûle les feuilles avant même le lever du jour, le combat semble perdu d’avance.
Sur les coteaux de Moissac, vers 5h00 on a flirté déjà avec le zéro degré. Les agriculteurs s’appellent, chacun compare les températures sur ses parcelles. L’inquiétude est forte. Elles descendront par endroits jusqu’à -4° avec en tête le terrible épisode de 1991.
UNE VÉGÉTATION PRÉCOCE
Dans les vignes, si elle est un peu moins précoce que l’an dernier, partout la vigne a débourré. Les feuilles sont sorties, et même parfois des bouts de grappes pointent au coeur du bourgeon. Le réchauffement climatique permet de faire des vins magnifiques, mais les viticulteurs sont davantage sous pression en début de campagne. Après le gel, il y aura peut-être la grêle… rien n’est encore gagné et le printemps promet d’être long.
LA RECHERCHE DE LA SOLUTION MIRACLE
Au loin, on entend le vrombissement d’hélicoptères. Deux engins survolent les parcelles d’arbres fruitiers. La méthode consiste à rabattre l’air plus chaud situé à une quinzaine de mètres de hauteur. Les hélicoptères jouent le rôle de ventilateurs géants. Ici aussi le spectacle est saisissant, dans un ciel enfumé à travers lequel les premiers rayons du soleil percent.
En pivotant à 360°, ces tours antigel jouent le même rôle que les hélicoptères. Ces éoliennes sont aussi équipées d’un système qui produit de l’air chaud. À moins 2 degrés, les tours antigels sont censées agir sur 5 hectares.
Ailleurs, ce sont des tracteurs qui tournent en continu avec, à l’arrière, des bouteilles de gaz qui alimentent un chauffage équipé d’un aspirateur. L’engin renvoie l’air chaud en espérant un effet sèchecheveux pour sécher l’humidité sur la feuille. D’autres tentent l’arrosage pour protéger les bourgeons en l’enrobant d’une couche protectrice de glace.
Tout est bon à prendre et les professionnels sont prêts à tout essayer. Au siècle dernier, contre le gel, on sonnait les cloches et on faisait des processions, aujourd’hui on n’hésite plus à envisager des investissements conséquents, mais rien à voir avec la perte d’une récolte.
LE RÉGIME DE CALAMITÉ AGRICOLE DÉPLOYÉ
Le gouvernement a annoncé vendredi matin qu’il va déployer le régime de calamité agricole à la suite de l’épisode de gel qui a touché de nombreuses régions ces derniers jours. Le ministre de l’agriculture Julien Denormandie assure que l’état sera aux côtés des producteurs, sans préciser le montant de l’enveloppe qui sera débloquée.
Sur le Tarn-et-garonne, on estime à près d’un tiers la perte sur le chasselas et la moitié à trois-quart de la production de prunes ou de cerise. Pour les fruits d’automne comme la pomme ou le kiwi, c’est encore difficile de se prononcer, les arbres sont en fleurs et donc moins sensibles au gel. Les prochaines semaines permettront d’y voir plus clair.
Cette année, la nouvelle lune, et donc la lune rousse, débute le 12 avril 2021 et prendra fin le 11 mai 2021, soit 29 jours plus tard. Autant dire que rien n’est encore gagné.