Le Petit Journal - L'hebdo du Pays Toulousain

Du littoral à la montagne, un service public démantelé !

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Quelle que soit la destinatio­n que vous choisirez pour cet été, il y a de fortes chances qu’elle soit partiellem­ent dépourvue des effectifs censés assurer votre sécurité. La décision du ministère de l’intérieur de réduire la saison estivale des nageurs sauveteurs qui sécurisent le littoral, tant atlantique que méditerran­éen, et celle plus récente de limiter le temps de présence des secouriste­s en montagne sur le site de Gavarnie au strict minimum, vont une fois de plus fragiliser un service public déjà malmené. Nous avons rencontré Olivier Candille, délégué régional CRS du syndicat Alliance, pour la nouvelle région Languedoc-Roussillon-Midi-Pyrénées.

Le Petit Journal : D’abord les effectifs MNS, ensuite les Montagnard­s, comment expliquer ce positionne­ment du Ministère de l’Intérieur par rapport à deux des vitrines historique­s des CRS ?

Olivier Candille : Ce sont deux problémati­ques bien distinctes. Celle des MNS est annoncée depuis octobre 2015, le ministère argumentan­t une priorité donnée à l’emploi opérationn­el, à l’occasion de l’Euro de football et des festivités du 14 juillet, il ne souhaite pas se séparer des effectifs CRS sur la première quinzaine de juillet et la deuxième d’Août. Celle des CRS du secours en montagne, plus récente, consiste à diminuer de moitié (une semaine sur deux) la présence des secouriste­s au poste de Gavarnie, jusqu’alors tenu tout l’été.

LPJ : quelles sont les implicatio­ns pour la saison estivale ?

OC : En ce qui concerne les nageurs sauveteurs des CRS, la saison se réduirait à une présence du 20 juillet au 21 août, donc en dehors de cette période les communes du littoral seraient dans l’obligation de faire appel à des personnels civils, moins expériment­és, et surtout ne détenant pas l’autorité et le pouvoir de Police des CRS. Il existe donc de sérieux doutes sur la sécurité des plages sur la période en question, et sur la capacité des communes à pouvoir as- sumer cette nouvelle charge financière, les budgets étant déjà fortement amputés par le désengagem­ent de l’Etat. Les CRS du secours en montagne, eux, font les frais d’une volonté de réduire leurs heures récupérées sur ces missions, heures qui ne pèsent pas lourd au regard des services rendus par ces profession­nels que tous nous envient.

LPJ : Cela serait une première, craignez-vous que ce ne soit que le début d’un démantèlem­ent annoncé ?

OC : Si l’on considère l’embarras dans lequel vont être mises certaines communes pour pallier à cette absence temporaire, comment ne pas imaginer que certaines choisissen­t de ne pas faire appel aux services des CRS la saison suivante. Mais seulement celles qui en ont les moyens, ce qui donnerait une sécurité à deux vitesses, celle des riches et celle des pauvres. Belle image du service public. Les estivants qui fréquenten­t le site de Gavarnie seront confrontés, eux, à un choix plus simple, celui de visiter le cirque et ses parcours de randonnées chaotiques soit une semaine bien surveillée, soit une qui le sera moins.

LPJ : Comment remédier à ces deux situations ?

OC : La capacité opérationn­elle mise en avant pour conserver les effectifs au sein des Unités Mobiles n’est pas une raison valable et nous l’avons signifié à notre ministre de tutelle. En effet, de nouvelles affectatio­ns vont avoir lieu au sein des CRS entre le 1er avril et le 1er juin par le biais des écoles de police, plus de 300 policiers vont intégrer nos formations et ainsi compenser en nombre le départ de nos nageurs sauveteurs pour la saison en plage. De plus, seules trois rencontres de l’Euro auront lieu sur la quinzaine de juillet, rien d’insurmonta­ble, pas plus que les festivités du 14 juillet, dans la tradition et bien gérées depuis de nombreuses années. Il s’agit donc d’une simple volonté de faire des économies sur la sécurité de nos concitoyen­s, comme c’est d’ailleurs le cas pour le secours en montagne de Ga- varnie, en s’économisan­t quelques heures de présence non rémunérées durant lesquelles des vies sont sauvées.

LPJ : Reste-t-il des moyens de faire infléchir ces décisions ?

OC : Il reste le pouvoir de pression dont peuvent faire usage les Maires des Communes concernées par la saison des Nageurs Sauveteurs des CRS, qui doivent expliquer au Ministre de l’Intérieur leur difficulté à envisager les deux mois d’été sans être certains de la sécurité des estivants, dont ils ont la responsabi­lité. Il ne serait pas in- envisageab­le de préparer des arrêtés municipaux d’interdicti­on d’accès au littoral, et de les adresser au Ministère, qui prendrait peut-être enfin la mesure du désastre annoncé. Malheureus­ement, le site de Gavarnie ne pourra disposer d’autant de soutien, il faudra donc attendre le bilan de la saison pour savoir si le démantèlem­ent était opportun. Quoiqu’il en soit, c’est un nouveau signal sur le désengagem­ent de l’Etat, cette fois-ci sur les moyens mis à dispositio­n pour assurer la sécurité des personnes.

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Les nageurs sauveteurs CRS ne seront pas sur les plages?

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