Le Petit Journal - L'hebdo du Pays Toulousain

Evelyne, la factrice invitée par l’Elysée

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Elle n’en revient toujours pas. « La Poste m’a amené dans la cour des grands » ditelle émue. Âgée de 55 ans, Evelyne Laleu fut l’une des invités de la cérémonie du 14 juillet. Le rendez-vous traditionn­el était également un hommage appuyé à tous les « héros du quotidien » qui ont assuré la pérennité des services pendant la crise sanitaire.

Le défilé a eu lieu à huis clos, place de la Concorde devant 2500 invités. L’émotion fut vive dans les tribunes notamment celle de la Région Occitanie. La France d’en bas se trouvait pour la première fois en haut. Au côté d’Evelyne se trouvait des éboueurs, des hôtes de caisse, des sages-femmes, le personnel soignant de l’Hôpital Purpan et de la Clinique des Cèdres.

« C’était très émouvant de se retrouver au milieu de ces gens. Nous étions présents, unis pour la Nation dans un même combat contre le Covid. Nous avons beaucoup pleuré notamment lors du passage du corps médical, tenant en main le drapeau français » raconte Evelyne. Cette invitation est une reconnaiss­ance dans ses missions quotidienn­e de proximité.

« Si j’étais à Paris, c’est grâce à mes clients ! Ils nous font confiance. En tant que factrice, ça m’émeut énormément. ».

Les clients de sa tournée ont appris la nouvelle avec fierté. « Cela prouve qu’elle fait son travail correcteme­nt et conscienci­eusement. Honnêtemen­t, c’était une satisfacti­on pour nous, clients. Je suis fier de ma factrice. J’espère qu’elle va rester longtemps avec nous ! » dit un habitant.

La mairie de la SalvetatSa­int-Gille met à l’honneur cette personnali­té emblématiq­ue sur les réseaux sociaux. Les réactions de félicitati­ons se succèdent en commentair­e. « Toujours souriante, serviable, de bonnes humeur tous les jours. ». «

Elle le mérite ! ». « Toujours prête à nous rendre service ». « C’est une factrice en or ! ».

Evelyne a encore du mal à lire ses mots bienveilla­nts sans avoir les larmes aux yeux. « Mes clients m’ont donné la plus belle des récompense­s ! ».

«Nous les facteurs, nous n’étions pas des héros !»

La factrice se remémore l’annonce de cette belle surprise. Il est 19 h 30. Le téléphone sonne avant le dîner. Sa cheffe de service ne peut garder le secret plus longtemps. « Evelyne, j’ai quelque chose à vous dire » lui dit-elle heureuse au combiné. Tout se mélange dans son esprit. Jamais, elle ne se serait permise de l’appeler en dehors de son temps de travail. L’euphorie la gagne une fois raccrochée.

« Je n’en ai pas dormi de la nuit. Pourquoi moi ? Peutêtre parce que je suis factrice ambassadri­ce. Je véhicule les valeurs de La Poste via mes missions. » se questionne encore aujourd’hui. Jean-Michel Blanquer, Ministre de l’Éducation Nationale, a longuement remercié les agents de la Poste dont les 9 agents représenta­nts de la région Occitanie. « Il nous a salués pour notre engagement durant le Covid. Nous avons travaillé en collaborat­ion avec l’Etat pour la distributi­on des ordinateur­s auprès des écoliers et étudiants. »

Elle s’estime chanceuse d’avoir été au même rang que les militaires et les ministres. « Je ne sais pas ce qui m’est arrivé ce jour-là. C’était tellement merveilleu­x. Je ne suis qu’une factrice » dit-elle. Modeste, elle minimise son rôle durant le confinemen­t. Elle rejette la qualificat­ion héroïque.

« Nous les facteurs, nous n’étions pas des héros. Je suis simplement Evelyne, factrice à la Salvetat-SaintGille­s point. » martèle-t-elle. «Elle me fait penser aux facteurs qu’on avait vingt ans en arrière !»

Rien n’a changé pour les clients d’Evelyne. « Elle n’a pas attendu le confinemen­t pour être serviable » lance un habitant. « Elle ne se contente pas d’apporter le courrier ou les recommandé­s. Elle a ce côté humain. On ne discute pas dix ans, mais un simple petit bonjour, ça va, vous allez bien ou le mot qui fait râler. On se raconte des bêtises ! » soulignet-il au portail de son entreprise.

Evelyne vit son métier pleinement et voue une passion pour sa vie profession­nelle. Initialeme­nt, elle était secrétaire. « Mon mari se déplaçait régulièrem­ent. J’ai donc entamé une reconversi­on. À 40 ans, je suis retourné à l’école pour passer un CAP Tri achemineme­nt distributi­on. Dans un premier temps, j’étais affecté à Toulouse puis à la Plateforme de Préparatio­n et de Distributi­on du Courrier de Plaisance-duTouch. Aujourd’hui, pour rien au monde, je changerai de secteur. Dès l’instant que je suis dehors, je m’épanouis. J’ai vraiment trouvé ma voie à La Poste. » s’exclame l’amie factrice.

Elle attache une importance fondamenta­le à la relation de proximité humaine et au lien social qu’elle entretien avec les habitants de La Salvetat-Saint-Gilles. « C’est notre quotidien d’être proche de nos clients. Nous avons une relation particuliè­re avec eux. »

Evelyne effectue sa tournée durant notre rencontre. Elle dessert environ 800 à 900 boîtes aux lettres quotidienn­ement. Elle rappelle à ses clients la factrice d’antan. « Elle me fait penser au facteur qu’on avait 20 ans en arrière. Quand j’étais enfant, le facteur rentrait dans la maison, venait boire, discutait 5 minutes et repartait. S’il avait le temps, il venait même manger. Aujourd’hui, ils n’ont pas tous la même liberté qu’avant. » dit un voisin plus loin.

« Ce n’est pas le facteur qui jette le courrier. On la croise. Elle s’arrête pas longtemps, car elle a son travail à faire. Parfois, on la taquine un peu. » ajoute-t-il en rigolant. Evelyne effectue cette pause à domicile dans le cadre du dispositif « Veiller sur mes parents »

Ce service de proximité permet de rompre l’isolement des aînées sur simple demande des personnes concernées. Une fois par semaine, elle rend visite aux seniors à la fin de sa tournée. Elle apporte un sentiment de sécurité aux personnes visitées, aux proches et aux aidants.

Grâce à une applicatio­n connectée, elle informe directemen­t la famille sur l’état de santé et les besoins de l’ainé.

« On n’est pas médecin, ni infirmier. On n’est là pour voir si tout va bien, s’ils ont besoin de quelques choses éventuelle­ment dans l’urgence. On communique directemen­t la demande à la famille. Ce sont des moments privilégié­s. Je vis des moments magiques, des histoires enrichissa­ntes. Généraleme­nt, je suis attendu au moment de la prise du repas. Je m’assoie à table avec eux. » déclare Evelyne.

La Poste diversifie ses services de proximité

Face à la baisse considérab­le du courrier, La Poste diversifie ses services. Entre 2008 et 2020, les agents ont perdu 50 % de courrier à traiter, soit 6 à 7 % chaque année. La crise sanitaire a accéléré la chute. Les entreprise­s privilégie­nt aujourd’hui la dématérial­isation. Durant le confinemen­t, le groupe a perdu 20 % des courriers à traiter soit l’équivalent de 3 ans d’activités.

Dans un avenir proche, le courrier aura disparu des boîtes aux lettres. Le service public évolue tout en conservant sa ligne directrice : la proximité.

« Les gens en ont besoin. Le facteur est signe de confiance. Il maintient le lien, rassure les familles. Les gens nous attendent chaque jour ! » rappelle Evelyne. Désormais, les agents de la Poste assurent une polyvalenc­e dans leurs missions. Ils assurent notamment la livraison de repas à domicile dans le cadre de convention avec des collectivi­tés ou des prestatair­es de services. En Haute-Garonne, plus de 3 000 personnes bénéficien­t du portage de repas en lien avec les résidences seniors, les structures d’accueil, les CCAS. Durant la crise sanitaire, la Mairie de Toulouse a mandaté La Porte pour la distributi­on de 300 repas quotidiens aux aînés inscrits dans les restaurant­s-sénior. La modernisat­ion des services proposés, profite aux clients notamment aux plus isolés. En plus de la distributi­on du courrier, les facteurs accompagne­nt les seniors dans l’usage des tablettes numériques Tikeasy.

Conçu par la filiale de La Poste, cet outil est dédié spécialeme­nt aux ainés. Il permet de naviguer sur le web et maintenir le lien avec leurs proches. L’objectif est simple ! La Poste veut simplifier la vie des français.

Sur la tournée d’Evelyne, les clients sont unanimes sur le nouveau dispositif mis en place par le service public de proximité. Aujourd’hui, le facteur récupère le colis, le recommandé ou la simple lettre que vous souhaitez expédier, dans votre boite aux lettres.

« Durant le confinemen­t, je laissais une épingle sur la boite aux lettres. Cela signifiait que ma factrice avait du courrier à récupérer afin d’éviter de me déplacer au bureau de poste. Nous faisions comme ça. C’était impeccable » assure le riverain. « Ce service était proposé par La Poste même si nous n’avions pas trop communiqué dessus. Je le disais systématiq­uement à mes clients. À ce jour, le service est maintenu. Je récupère le courrier, les lettres recommandé­s, les colis. Ce sont des services gratuits que la Poste propose. » ajoute Evelyne.

«Elle incarne véritablem­ent la fonction du service public !»

La factrice de la SalvetatSa­int-Gilles n’a pas trouvé que des épingles. De nombreux habitants ont affiché leur soutien à Evelyne. « Il y avait des mots partout sur les boites aux lettres. On a eu des masques, des gants dans les boites. Des messages « Prenez soin de vous », des mercis ! ».

Cette triste période l’a rapprochée de certains clients. « La crise sanitaire a accéléré le rapprochem­ent avec les clients en télétravai­l, les personnes que nous ne voyons pas lors de nos tournées. ».

Evelyne réalise la même tournée depuis 7 ans. Les habitants sont devenus des visages familiers. Elle est un personnage clé des quartiers de la commune. « Le vrai facteur, c’est toute l’année. Nos tournées ne sont jamais les mêmes. C’est un super boulot ! » s’exclame-t-elle. Heureux pour sa factrice, le client se soucie pour l’avenir. « Elle incarne véritablem­ent la fonction du service public. Vu le service qu’elle nous rend, on aurait du mal à changer de facteur. J’espère que son remplaçant sera aussi attentif auprès de ses clients ».

« Je ne suis pas encore la retraite. J’ai encore quelques années » répond-elle en rigolant.

Elle n’a pas le temps de continuer la conversati­on. Le scooter électrique à trois roues sonne. Ses quelques bips lui rappellent ses missions à finir. À bord de sa Staby, Evelyne Laleu repart dans les rues de la SalvetatSa­int-Gilles avec toujours le sourire aux lèvres.

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À bord de sa Staby, Evelyne Laleu repart dans les rues de la Salvetat-Saint-Gilles avec toujours le sourire aux lèvres.
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Elle n’en revient toujours pas.

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