Le Petit Journal - L’hebdo local de l’Ariège
Un rêve de Babayaga
Notre amie Mathilde nous a demandé de passer la voir. Elle voulait nous parler d’une femme qu’elle admire et que Mathilde souhaitait rencontrer. Malheureusement elle est morte en février dernier. Elle s’appelait Thérèse Clerc et en 1997, elle avait imaginé de créer la première Maison des Babayagas à Montreuil. Dans la tradition orale russe, les Babayagas sont des sorcières. « Thérèse » avait voulu un lieu qui permettrait aux femmes d’être actrices de leur vieillesse, maîtresse de leurs vieux os. Après plusieurs années de batailles administratives, la Maison des Babayagas a vu le jour en 2013. C’est très important quand on commence à vieillir de ne pas rester isolée. Dans ce genre de lieu non seulement on ne l’est pas , mais on peut aussi être dans la vie, dans la ville, être citoyennes, solidaires. Les vingt et une occupantes de cet immeuble HLM du centre-ville imaginent au quotidien des projets pour vieillir comme elles ont vécu, indépendantes et autonomes. En plus d’habiter ensemble, elles organisent des activités ouvertes avec des débats sur des thèmes de société, des repas partagés le deuxième vendredi de chaque mois.
C’est à ce moment de son récit que Mathilde nous fait part de son projet : créer une Maison des Babayagas dans sa demeure trop grande pour elle et qui possède tant de ressources. Avec sa retraite de moins de sept cent euros par mois elle n’y arrive plus. Quelqu’un lui a fait remarquer qu’elle a droit aux restos du coeur et à certainement bien d’autres aides. Elle rétorque qu’elle ne se sent pas pauvre mais riche de tout ce qu’elle a à donner. Son expérience, ses connaissances, ses savoir faire, son charisme, sa culture. Prendre conscience de sa pauvreté serait pour elle un tel choc psychologique qu’elle n’est pas sûre de pouvoir s’en remettre. Affaire à suivre.