Le Petit Journal - L'hebdo local de l'Aveyron

Les boîtes de nuit broient du noir mais gardent espoir

Crise économique, réglementa­tions drastiques, nouveaux modes de rencontres et de consommati­on de la musique. En trente ans, le nombre de discothèqu­es a été divisé par deux, surtout dans les villes moyennes et le monde rural.

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Rideau. « La nuit, c’est trop de soucis et de trop lourdes responsabi­lités », avançent comme explicatio­n les gérants de la nuit locale. Impossible de répondre à « l ’ inf lat ion des réglement ations sans sortir un sacré billet .

Deux fois moins en 30 ans

Ces fermeture ne sont pas des cas isolés. Il éclaire une tendance forte depuis le début des années 2000 : la discothèqu­e « à papa » ne séduit plus, la boule à facettes tourne de plus en plus dans le vide. Le nombre de boîtes de nuit en France a été divisé par deux en trente ans, pour descendre sous la barre des 2000 établissem­ents aujourd’hui. Plus d’une discothèqu­e disparaît chaque semaine en France. Leur chiffre d’affaires (en 2014), 900 millions d’euros annuels, diminue chaque année. Et on licencie Dj, barmen, vigiles. « Il y a un grand malaise économique de la filière », nous confirme un directeur . Selon ce profession­nel, « ce secteur n’a pas disparu, mais il souffre énormément », notamment en milieu rural. Il parle d’« épuration » de discothèqu­es, fondée sur « une stigmatisa­tion de cette activité ».

« Plombé économique­ment »

Une conjonctio­n de facteurs explique cette désaffecti­on des clients. La crise économique de la fin des années 2000 a réduit drastiquem­ent les budgets « samedi soir » des jeunes. Beaucoup d’établissem­ents sont restés sur des modèles anciens. Les aspects réglementa­ires ont découragé patrons et clients (interdicti­on de fumer, mise aux normes de sécurité et insonorisa­tion, contrôles routiers, nuisances dénoncées par le voisinage). Tout un arsenal que le syndicat profession­nel juge « légitime » en termes de santé publique, mais qui a « plombé économique­ment le secteur ». La sortie en boîte, le « must » des années 1975- 1995, ne fait plus le plein « Jusqu’au bout de la nuit », pour reprendre le titre de Début de Soirée, duo star d’une époque strass-paillettes-Malibu révolue. « C’était un lieu de rencontres, d’échanges », retrace Rémi, un pionnier du monde de la nuit. Un terrain de drague aussi. Mais les applicatio­ns de rencontres sur smartphone, l’uberisatio­n de l’amour, ont renvoyé aux vestiaires la magie des premiers baisers sur le dance-floor.

Même phénomène pour la musique : que découvrir comme tubes en boîte alors que Deezer ou Spotify permettent d’ambiancer son salon ou son garage avec un juke-box mondialisé ? Certaines villes, presque à contre-courant, ont néanmoins compris qu’elles pouvaient jouer sur cette image festive de vie nocturne trépidante. Parallèlem­ent, le milieu s’est profession­nalisé. « Pour les autorités, avant, le patron de boîte, c’était quelqu’un de douteux. Aujourd’hui, c’est un businessma­n, qui est entouré de directeurs artistique­s ! » Autre époque, autres profils. Et nouveaux

La tendance à la disparitio­n des boîtes de nuit, relevée dans votre étude en 2014 , se poursuit. Les établissem­ents de nuit sont multiples. C’est une part importante de la vie sociale et de la vie économique de notre pays. Il y a les établissem­ents de restaurati­on de plus en plus amenés à faire des animations, les bars à ambiance musicale et il y a les établissem­ents de danse et de spectacles.

La baisse a été très forte entre 2008 et 2011. Depuis 2014, on constate une perte de clientèle des établissem­ents de nuit dansants, comme les discothèqu­es. Il y a un effilochem­ent du nombre d’établissem­ents. On constate aussi une baisse de leur résultat économique, d’environ 10 % entre 2014 et 2015.

Les motifs qui les poussent à fermer son multiples. Il y a plusieurs causes réglementa­ires, liées aux établissem­ents qui reçoivent du public (tabac, sécurité, accessibil­ité) ou aux nuisances so- espoirs : « L’offre va se réguler, de nouveaux établissem­ents ont compris comment se redynamise­r ». La nuit rêve encore d’avoir de beaux jours devant elle. nores notamment en zone urbaine.

La crise économique depuis 2008, le chômage qui touche la jeunesse, constituen­t d’autres facteurs. La priorité des jeunes dans les dépenses est différente par rapport à des époques précédente­s. Le modèle de l’établissem­ent dansant tel qu’on l’a connu depuis les années 1970 arrive en fin de vie. Il faut proposer autre chose, e réinventer.

Depuis quelques années, on perçoit l’émergence de nouveaux établissem­ents de nuit, plus axés sur le « live », avec des Dj/remixeurs et plus seulement des « pousseurs de disques ». Les musiques électroniq­ues, avec tout un pan de création musicale plutôt en marge de la société et des profession­nels, se sont organisées pour faire vivre cette musique et une jeunesse dans des lieux alternatif­s. Petit à petit, ces gens-là grandissen­t, se profession­nalisent et souhaitent vivre de leur passion et du business qu’ils en ont fait.

L’établissem­ent dansant des années 70 arrive en fin de vie

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Actuelleme­nt, plus d’une discothèqu­e disparaît chaque semaine en France

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