Le comportement récent de Manuel Valls déroute son gouvernement. Paroles de ministres.
Comment cela a-t-il débuté ? D’abord par des signaux faibles. Le jour où il a commencé à prendre un temps avant de répondre. Puis deux. Quand il n’a plus écouté les relances pour finir ses phrases doctement, comme si ses mots devaient être gravés dans le marbre. Bref, quand il a fini par s’écouter parler. Quand son corps s’est raidi. « Quand ses yeux n’ont plus vraiment croisé nos regards » , confie l’un de ses ministres. Manuel Valls, sujet au burn-out ? « Ce sera bientôt une maladie professionnelle, il aurait tort de s’en priver » , s’amuse l’un des membres de son gouvernement, par ailleurs accablé par la semaine de folie que l’escapade berlinoise a fait vivre à l’exécutif. Le coup de folie de Valls, c’est LE sujet de conversation du conseil des ministres. « On lui a dit : arrête, rembourse, mets fin à cette histoire. Mais il ne voulait rien entendre. Il ne voulait pas avoir l’air de mettre un genou à terre face à des ennemis qu’il méprise. »
Des ennemis ? Quels ennemis ? « Il n’a pas compris que c’est la société française qui ne supporte plus le bon plaisir des puissants » , se lamente un autre de ses proches. « Il a pris la grosse tête. Pour faire le point sur mes dossiers, j’ai demandé un rendez-vous en tête à tête à Hollande et Valls. Le secrétariat du président m’a rappelé le lendemain. Trois semaines plus tard, toujours aucune nouvelle de celui du Premier ministre… », constate, triste, l’un de ses ministres.
En prenant la suite de Jean-Marc Ayrault, Valls a instauré un séminaire gouvernemental tous les jeudis. Une manière de rassembler ministres et secrétaires d’Etat au moins une fois. L’initiative avait été accueillie avec enthousiasme. Enfin, on allait pouvoir dialoguer, évaluer les dossiers sous un angle politique et non plus technique (l’un des grands reproches faits à Ayrault). « Or les réunions du jeudi ont tendance à s’espacer de plus en plus. Et on n’a plus la parole. C’est Valls qui parle. Un peu Rebsamen, quand il a un sujet, et Macron. Nous, on ne nous demande plus notre avis, lâche l’un des participants. Pis ! On a découvert la réforme du collège de Najat Vallaud-Belkacem en ouvrant les journaux. On n’en avait jamais parlé entre nous. C’est quand même extraordinaire, non ? »
Inutile de revenir sur la suite funeste du voyage berlinois : le remboursement des billets des enfants qui, la veille, étaient censés « ne rien coûter aux contribuables » .