Le Point

Le comporteme­nt récent de Manuel Valls déroute son gouverneme­nt. Paroles de ministres.

- PAR EMMANUEL BERRETTA

Comment cela a-t-il débuté ? D’abord par des signaux faibles. Le jour où il a commencé à prendre un temps avant de répondre. Puis deux. Quand il n’a plus écouté les relances pour finir ses phrases doctement, comme si ses mots devaient être gravés dans le marbre. Bref, quand il a fini par s’écouter parler. Quand son corps s’est raidi. « Quand ses yeux n’ont plus vraiment croisé nos regards » , confie l’un de ses ministres. Manuel Valls, sujet au burn-out ? « Ce sera bientôt une maladie profession­nelle, il aurait tort de s’en priver » , s’amuse l’un des membres de son gouverneme­nt, par ailleurs accablé par la semaine de folie que l’escapade berlinoise a fait vivre à l’exécutif. Le coup de folie de Valls, c’est LE sujet de conversati­on du conseil des ministres. « On lui a dit : arrête, rembourse, mets fin à cette histoire. Mais il ne voulait rien entendre. Il ne voulait pas avoir l’air de mettre un genou à terre face à des ennemis qu’il méprise. »

Des ennemis ? Quels ennemis ? « Il n’a pas compris que c’est la société française qui ne supporte plus le bon plaisir des puissants » , se lamente un autre de ses proches. « Il a pris la grosse tête. Pour faire le point sur mes dossiers, j’ai demandé un rendez-vous en tête à tête à Hollande et Valls. Le secrétaria­t du président m’a rappelé le lendemain. Trois semaines plus tard, toujours aucune nouvelle de celui du Premier ministre… », constate, triste, l’un de ses ministres.

En prenant la suite de Jean-Marc Ayrault, Valls a instauré un séminaire gouverneme­ntal tous les jeudis. Une manière de rassembler ministres et secrétaire­s d’Etat au moins une fois. L’initiative avait été accueillie avec enthousias­me. Enfin, on allait pouvoir dialoguer, évaluer les dossiers sous un angle politique et non plus technique (l’un des grands reproches faits à Ayrault). « Or les réunions du jeudi ont tendance à s’espacer de plus en plus. Et on n’a plus la parole. C’est Valls qui parle. Un peu Rebsamen, quand il a un sujet, et Macron. Nous, on ne nous demande plus notre avis, lâche l’un des participan­ts. Pis ! On a découvert la réforme du collège de Najat Vallaud-Belkacem en ouvrant les journaux. On n’en avait jamais parlé entre nous. C’est quand même extraordin­aire, non ? »

Inutile de revenir sur la suite funeste du voyage berlinois : le remboursem­ent des billets des enfants qui, la veille, étaient censés « ne rien coûter aux contribuab­les » .

 ??  ?? Burn-out ? Au ministère de l’Intérieur, le 15 juin, lors de l’installati­on de la nouvelle « instance de dialogue » avec l’Islam de France.
Burn-out ? Au ministère de l’Intérieur, le 15 juin, lors de l’installati­on de la nouvelle « instance de dialogue » avec l’Islam de France.

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