Shakespeare superstar
De la série « Empire » au Festival d’Avignon, où il régnera en scène, le prodigieux et prolifique dramaturge est partout. Analyse d’un succès qui défie le temps.
Jamais un mort ne fut plus vivant. William, fils de John, né et mort un 23 avril. En près de cinquante ans, il a écrit 17 comédies, 11 tragédies, 9 pièces historiques. Soit 37 chefs-d’oeuvre et des sonnets célèbres pour leur poésie fabuleuse. Et cet homme-là, à coup sûr surnaturel, serait mort ? Alors que chaque année, chaque mois, chaque jour une pièce du cher Will est traduite et montée ; qu’aux Etats-Unis, chaque été se déroule un festival Shakespeare ; que les scénaristes d’« Empire », la dernière série américaine qui cartonne, ont puisé leur inspiration dans « Le roi Lear », Lear devenant un magnat noir de l’empire du disque bien embêté de ne pas savoir à quel (mauvais) fils léguer cet… empire, tout cela baignant dans le gangstarap. Le sang shakespearien coule à flots dans « Game of Thrones », la maison Lannister n’a rien à envier à la maison Lancaster, ses héroïnes tiennent de Lady Macbeth, qui a créé l’archétype de la femme fatale à Hollywood.
Chaos, sexe, fracas, magie. Shakespeare est inoxydable. L’acteur Tim Robbins a récemment enchanté les Nuits de Fourvière avec son « Songe d’une nuit d’été ». Au Théâtre de la Ville en juin 2014, la chorégraphe Anne Teresa de Keersemaeker a parsemé son ballet « Golden Hours » de citations de « Comme il vous plaira ». Tout le monde connaît son nom, ses héros, ses vers : « Roméo et Juliette » (et « West Side Story », sa version Broadway et cinématographique) reste la pièce la plus connue, « Etre ou ne pas être » relève autant de la philosophie que du slogan. On dit « shakespearien » quand monstrueux ou phénoménal paraissent trop faibles.