Le Point

Ils ont oublié de mourir

Avec « Peshmerga », Bernard-Henri Lévy témoigne au plus près de l’engagement des combattant­s kurdes contre Daech.

- PAR SÉBASTIEN LE FOL

Baignée de lumière, l’immense Mossoul s’étire le long du Tigre. Des habitants vaquent à leurs occupation­s. Ballet tranquille de voitures sur les artères principale­s. Sous le joug de l’Etat islamique, la cité irakienne ne donne aucun signe de fébrilité en cet automne 2015. Filmée par un drone de l’équipe du film « Peshmerga », l’atmosphère n’indique pas l’imminence d’une bataille cruciale. Ces images d’une ville engourdie tranchent avec celles diffusées par la propagande de Daech quelques mois plus tôt : les « forcenés du mal » détruisant à l’explosif la mosquée censée abriter la tombe du prophète Jonas, avant de massacrer au marteau-piqueur les statues et les fresques assyrienne­s du musée.

Mossoul ! Et si c’était pour l’antique Ninive que Bernard-Henri Lévy (éditoriali­ste au Point) avait entrepris ce périple le long de la ligne de front entre le Kurdistan irakien et le territoire contrôlé par l’Etat islamique ? « Etre juif, c’est aller à Ninive », écrit-il dans « L’esprit du judaïsme » : aller jusque dans les lieux « où l’être juif est le plus radicaleme­nt mis en question ».

Aux côtés des peshmergas, il s’est approché au plus près de la « cité du mal ». Les combattant­s kurdes scrutent ceux de l’Etat islamique dans leur viseur. « Donnez-nous des chars, et nous nous occuperons du reste », s’impatiente­nt-ils. Que valent aujourd’hui ces mythiques combattant­s ? Selon le géopolitic­ien Gérard Chaliand, ils auraient « engraissé et vieilli », et les plus jeunes seraient réticents à se faire tuer pour des dirigeants qu’ils jugent corrompus. Rien de tel dans la vision héroïque qu’en donne Bernard-Henri Lévy – les peshmergas se battent « pour l’humanité tout entière », clame fièrement l’un d’eux.

« Peshmerga » les saisit à l’heure du destin. « On ne connaît pas un homme avant de l’avoir vu au danger », écrit Ernst Jünger dans « Orages d’acier ». La remarque vaut aussi bien pour le réalisateu­r que pour ceux qu’il

 ??  ?? Fauché. Le général Maghdid Herki, l’un des héros de « Peshmerga », avec BHL. Il mourra, les armes à la main, sur sa position des monts Zartik, au-dessus de Mossoul, lors d’une attaque de Daech, frappé d’une balle en plein front.
Fauché. Le général Maghdid Herki, l’un des héros de « Peshmerga », avec BHL. Il mourra, les armes à la main, sur sa position des monts Zartik, au-dessus de Mossoul, lors d’une attaque de Daech, frappé d’une balle en plein front.
 ??  ?? Ligne de front. Un peshmerga près de Mossoul, dans le Kurdistan irakien.
Ligne de front. Un peshmerga près de Mossoul, dans le Kurdistan irakien.

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