Le Point

Dans cette ville de Caroline du Nord le marché des microbrass­eurs explose. Enquête.

- PAR HÉLÈNE VISSIÈRE, ENVOYÉE SPÉCIALE À ASHEVILLE

Le paradis, pour un amateur de bière, doit ressembler à cette zone industriel­le. Il y a là, dans un mouchoir de poche, pas moins de 9 brasseries qui offrent chaque semaine à la dégustatio­n des centaines de lagers et d’ales pétillante­s. L’été, il suffit de se laisser guider par l’odeur. Tout ce quartier d’Asheville, une petite ville de Caroline du Nord, fleure bon la bière. Les buveurs assoiffés se pressent dans la salle de Wicked Weed dominée par un portrait géant d’Henri VIII. La légende raconte que le monarque n’aimait pas le houblon en vogue à son époque et l’aurait traité de « plante malfaisant­e et pernicieus­e » . N’en déplaise au bon vieux Henri, la Wicked Weed a connu un formidable succès, tout comme la brasserie du même nom fondée en 2012 par deux frères, Luke et Walt Dickinson, et leurs trois partenaire­s dans une vieille quincaille­rie où l’on vient siroter des chopes de Pernicious et de Freak of Nature, deux IPA (India Pale Ale) qui ont fait leur célébrité.

Longtemps abreuvée aux Budweiser et aux Coors insipides, l’Amérique s’est découvert une passion pour la bière artisanale. Il s’ouvre chaque jour dans le pays au moins 2 microbrass­eries, et fin décembre 2015 on en comptait 4 225, plus du double qu’il y a quatre ans. Mais, à en juger par les statistiqu­es, on est encore loin de la gueule de bois. Le segment « artisanal », qui a dépassé les 22 milliards de dollars annuels, répresente seulement 21 % du marché en volume. « Il n’y a pas de saturation, estime Bart Watson, de l’Associatio­n des brasseurs. On assiste au même phénomène que pour le café. Il y a trente ans, on n’en trouvait que deux ou trois sortes dans les supermarch­és. Aujourd’hui, il y a une multitude de marques et, quand on a goûté à un vrai cappuccino, on ne revient pas au jus de chaussette. »

La région d’Asheville, avec sa quarantain­e de microbrass­eries, est réputée pour afficher un des taux les plus élevés de microbrass­eurs par tête – ou plutôt par gosier – des Etats-Unis. « On pourrait passer cent jours ici sans jamais boire deux fois la même mousse » , affirme Mike Rangel, jovial patron d’Asheville Brewing. Et ce n’est pas un slogan de syndicat d’initiative. La variété est infinie, de l’IPA richement houblonnée à la stout noire comme la nuit aux arômes de café et de chocolat, en passant par toutes sortes de fantaisies extravagan­tes au bacon, au beurre de cacahouète ou à la figue de Barbarie. « Tout est possible » , résume Doug

 ??  ?? Effervesce­nce. Sierra Nevada, un gros brasseur artisanal californie­n, a dépensé plus de 100 millions de dollars pour s’installer à Asheville. Ci-dessous, dans les rues de la ville – qui a accueilli 10 millions de visiteurs l’an dernier –, la bière...
Effervesce­nce. Sierra Nevada, un gros brasseur artisanal californie­n, a dépensé plus de 100 millions de dollars pour s’installer à Asheville. Ci-dessous, dans les rues de la ville – qui a accueilli 10 millions de visiteurs l’an dernier –, la bière...

Newspapers in French

Newspapers from France