Le nouveau Premier ministre britannique est une « thatchérienne » sociale.
Un jour d’octobre 2002, une députée du Parti conservateur s’avance à la tribune de la conférence annuelle de la formation et prononce une phrase qui fera l’effet d’une bombe : « Notre base est trop étroite, tout comme (…) notre capital de sympathie. Vous savez comment certains nous appellent ? Le Nasty Party. » L’expression – le « méchant parti » – est restée, et son auteure, une dénommée Theresa May, a depuis fait bien du chemin.
Avec un autre député lui aussi promis à un brillant avenir, David Cameron, elle est à l’avant-garde de la « modernisation » du parti et contribue à en redorer le blason. Le parti remporte les élections en 2010. Pour ce faire, les conservateurs ont dû montrer qu’ils assureraient, une fois au pouvoir, une méritocratie autant économique que sociale. Depuis 2010, avec un record de création d’emplois et une réforme éducative approfondie, ils ont en grande partie tenu leurs promesses.
Le nouveau Premier ministre du royaume est fidèle à la députée qu’elle a été depuis dix-neuf ans. En pourfendant l’ « injustice sociale » dans son premier discours officiel, elle s’inscrit dans la lignée de Cameron, qui avait placé ses deux mandatures sous le signe de la « justice sociale » , à côté de la réussite économique. Et si elle ne souhaite pas convoquer de nouvelles élections, c’est qu’elle entend respecter un « manifeste » électoral qu’elle a contribué à écrire.
De fait, malgré les apparences, les torys sont profondément unis sur les grands sujets politiques. Même le Brexit n’a été qu’une petite entaille. Le résultat est désarmant de stabilité : en quelques semaines, le parti a choisi comme Premier ministre une femme qui a défendu le maintien du pays dans l’UE mais qui a nommé à des postes clés trois pro-Brexit passionnés – Boris Johnson aux Affaires étrangères, David Davis au Brexit et Liam Fox au Commerce international. Quant au reste, le consensus domine : tous soutiennent la politique de retour à l’emploi du précédent gouvernement ; tous critiquent l’assistanat ; tous veulent améliorer la qualité de l’éducation. Il est un domaine, cependant, où l’accord est plus apparent que réel : l’économie. Theresa May prendrait-elle un chemin différent de ses prédécesseurs ? Les torys restent des libéraux et May ne déroge pas à la règle.