Le Point

Guy Sorman : « J’aurais voulu être français »

L’essayiste publie un récit où il revient sur son itinéraire intellectu­el. Le portrait qu’il brosse de la France va heurter. Il considère notamment que la laïcité fait des musulmans des « demi-citoyens ».

- S. M.

La voix est douce, captivante, autant que le sourire, qui apparaît comme une lueur entre chaque phrase, mais il convient de garder toute son attention au moment d’interroger Guy Sorman, l’auteur de « J’aurais voulu être français » (Grasset). Car, entre un récit familial poignant et une expérience américaine instructiv­e, l’intellectu­el libéral, à qui on doit « Les vrais penseurs de notre temps », livre une « réalité » –mot qu’il préfère à « vérité » – fracassant­e : la nation française ferait, selon lui, un distinguo entre ses enfants. Les musulmans seraient des « demicitoye­ns » , les victimes d’une islamophob­ie d’Etat qui aurait débuté avec la loi de 2004 contre les signes religieux à l’école. La laïcité ? « Une religion nationale », « intolérant­e » et « militante », qui se serait substituée au catholicis­me. « Aussi longtemps, écrit Sorman, que les moeurs ne contredise­nt pas les institutio­ns, ce qui est le cas du voile ou du régime halal, aucun jugement de valeur dans un Etat de droit n’autorise à dicter les moeurs. » Pour ces raisons, auxquelles il faut ajouter la « fièvre identitair­e » du moment ou le refus des autorités françaises d’accueillir des réfugiés syriens, Berl Sormann, de son nom de naissance, dit ne plus reconnaîtr­e la France. L’aimer ainsi, « excluante », est audelà de ses forces qui, elles, défendent le multicultu­ralisme, le droit à la différence et la diversité. « Nous croyons être d’un lieu, nous sommes d’une époque », postule l’auteur. De sa voix apaisée, libre et si dissonante…

Le Point : On sort de la lecture de votre livre avec le fort sentiment que vous n’aimez plus la France. Si bien qu’on ne reconnaît plus l’auteur du « Bonheur français » (Fayard), qui se montrait heureux d’être né sous les mêmes cieux que Montaigne. Guy Sorman :

La comparaiso­n avec « Le bonheur français » est intéressan­te, car ce livre, écrit en 1995, est

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