CETTE ANNÉE-LÀ...
Histoire. Un siècle comporte des années blanches. Prenez 1971. Que s’est-il passé d’important en 1971 ? Pas grand-chose. Sans doute parce que, en renversant les chiffres, 1917 fut une année très faste. Trop ? Jean-Christophe Buisson (en médaillon) évoque cette année vraiment pas comme les autres avec un éphéméride astucieusement choisi, pertinemment commenté. Qu’en retient-on ? Que l’année s’ouvre, le 1er janvier, sur la promesse de Woodrow Wilson, réélu président des Etats-Unis, de ne pas entrer en guerre, promesse bafouée le 6 avril. Que ce même 1er janvier, on retrouve aussi dans la Neva gelée le corps de Raspoutine : la famille impériale sera balayée dans quelques mois. 1917 est un feu d’artifice. Les créateurs aussi partent en guerre. En février, Kandinsky peint « Dusk » (crépuscule), qui annonce la Révolution. Le 10 avril, l ’ ur i noi r de Duchamp est refusé à New Yor k, e t l e 18 mai, un jour après l’inauguration des « Ny mp h é a s » à l’Orangerie, les ballets russes de « Parade », sur un poème de Cocteau, provoquent le scandale. Chaplin tourne « L’émigrant », Céline vit, avant de l’écrire, son « Voyage au bout de la nuit ». Aube du siècle, à défaut d’en être l’aubaine, 17 porte en son sein la suite de sa folie meurtrière. Mao prononce ses premiers discours. Mussolini, réformé, appelle à la venue d’un chef, Hitler se fait faucher ses pinceaux, Staline se place auprès de Lénine en lui rasant luimême la barbichette pour l’aider à fuir en Finlande, tandis que Freud élabore la notion du surmoi, dont ne s’embarrasseront guère ces dictateurs. Et, pour finir en musique, le 31 décembre, débarque à Brest un régiment américain avec un orchestre de jazz. Le premier disque de ces nouveaux sons a été gravé en juin. Le monde avait changé. Un feu d’artifice, on vous dit «1917, l’année qui a changé le monde», de Jean-Christophe Buisson (Perrin, 400 p., 24,90 €).