Le Point

NSA, CIA, FBI… Ils ont fait appel à Palantir, la société d’Alexander Karp, qui analyse des milliards de données partout sur la planète.

- PAR GUILLAUME GRALLET

Oubliez la Maison-Blanche. L’endroit le plus stratégiqu­e des Etats-Unis, le coeur du réacteur de la première puissance du monde n’est pas au 1600 Pennsylvan­ia Avenue, à Washington. Il se situe derrière un grand mur de minuscules briques rouges percé de vitres teintées. C’est le siège de Palantir. Une société américaine qui tire son pouvoir de l’exploitati­on industriel­le, mais minutieuse, de milliards de données géographiq­ues, économique­s, climatique­s, militaires, politiques, démographi­ques… Une entreprise secrète, qui travaille aussi bien pour l’armée que pour de grands groupes privés et n’a ni l’habitude ni l’envie de recevoir des journalist­es. Avant de pénétrer dans la forteresse Palantir, le visiteur peut néanmoins aller prendre des forces chez Lyft, un bar qui sert du j us de concombre à la menthe ou des smoothies au chou kale, fréquenté par des étudiants de Stanford. Quel silence ! Seul le ronflement du Caltrain, ce vieux tramway mécanique qui rallie, en quarante-cinq minutes, la petite ville tranquille de Palo Alto à San Francisco, rivalise avec la caresse du vent sur les érables. Au 100 Hamilton Avenue, on vérifie bien que l’on ne s’est pas trompé d’adresse : ici, il n’y a pas d’écriteau flashy géant devant lequel les touristes se prennent en photo comme on en trouve devant les QG de Facebook, Google ou Yahoo! La même discrétion est de mise sur la vingtaine de bâtiments loués par Palantir, un espace qui occupe environ 10 % des bureaux de la capitale de la Silicon Valley.

A l’accueil, c’est à un iPad que l’on doit montrer patte blanche. Quelques questions rapides pour gagner le droit de s’asseoir dans une salle d’attente décorée de peintures néocubiste­s, à côté d’un garage à vélos et juste au-dessous d’un immense mur de tee-shirts. Toutes les tailles sont disponible­s, mais le teeshirt est toujours le même. Gris anthracite, il est estampillé de la devise maison : « Save the shire » . Clin d’oeil de la société au roman fantastiqu­e de J. R. Tolkien, « Le seigneur des anneaux » : The Shire, c’est la Comté, le pays paisible et verdoyant des Hobbits. Il faut sauver la Comté. Ce qui revient à vouloir sauver le monde pour les 1 500 employés de l’entreprise. Le nom de Palantir, désigne, lui, la « Pierre de vision », une sorte de globe de cristal inventé par les elfes, qui permet d’observer des lieux distants dans l’espace et surtout de voir dans le futur. Avant de monter dans les étages, le visiteur passe à travers un sas surplombé de deux drapeaux : un américain et un britanniqu­e.

Palantir, créé en 2004 et valorisé 20 milliards de dollars, c’est un peu les oreilles et les yeux de l’Amérique. Grâce à sa puissance de calcul, il a aidé la CIA à localiser et

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