Le Point

Hafsia Herzi, à corps perdu

Révélée par « La graine et le mulet », la jeune Marseillai­se oscille entre femme-enfant et femme fatale dans le très beau « Sex Doll ».

- PAR VICTORIA GAIRIN

«V ous pouvez écrire que j’ai repris tous mes kilos, j’assume. » On a peu l’habitude de commencer l’interview d’une actrice en l’écoutant se confier sur son poids. Pourtant, Hafsia Herzi insiste : pas pour la graisse qu’ils ont à la maison. Il faut que tu sois plus crédible”. » Hafsia accepte le challenge. Se fait coacher et se nourrit de pommes et d’amandes. « Accepter un rôle, c’est s’investir pleinement. Le physique ne doit pas nous trahir. En l’occurrence, le corps de ces prostituée­s ne leur appartient plus. Il fallait que je ressente quel effet ça fait. » D’origine tunisienne et algérienne, petite dernière d’une famille nombreuse élevée par une mère femme de ménage, Hafsia a grandi dans les quartiers Nord de Marseille. « C’est de là que je tiens ma force, confie-t-elle. Ma mère nous a appris à dire merci à la vie, à nous battre et à ne pas nous plaindre. » C’est d’ailleurs à elle qu’elle consacre son premier long-métrage en tant que réalisatri­ce, en cours de tournage. Dans « Bonne mère », clin d’oeil à la sienne et à la basilique qui protège sa ville natale, elle raconte l’histoire d’une femme qui s’oublie pour se consacrer à ses enfants. « Ma mère fait à manger pour tout le monde sur le tournage, mes amis d’enfance ont accepté de jouer, certains avec leurs enfants. C’est de la débrouille, j’adore ça. » Elle jouait déjà une prostituée dans « L’apollonide », de Bertrand Bonello, et la voilà à nouveau dans le rôle d’une escort-girl. Qu’en pensent ses proches ? Et les Marseillai­s des quartiers ? « Ils sont admiratifs. Ils savent que ce sont des rôles difficiles, très forts. Et qu’il y a des sujets tabous dont le cinéma doit parler. » Les inconnus qui l’interpelle­nt violemment sur les réseaux sociaux, par téléphone ou dans la rue, Hafsia les ignore superbemen­t. « Je suis fière de ce rôle. Ce n’est pas à 70 ans que je vais jouer celui-là. On n’a qu’une vie. » Alors elle en profite. Multiplie les allers-retours entre Marseille et Paris, retrouve son ami Kechiche pour jouer dans son prochain film, tourne avec Romain Duris et Vincent Cassel pour Erick Zonca, rêve de travailler un jour avec Pedro Almodovar ou Asghar Farhadi… Et continue, sans fard, de faire ses gâteaux « Sex Doll », en salles le 7 décembre.

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Assumée. Hafsia Herzi, alias Virginie, prostituée de luxe. « Je suis fière de ce rôle. Ce n’est pas à 70 ans que je vais jouer celui-là. »

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