Le Point

Le célèbre avocat pénaliste Eric DupondMore­tti s’insurge contre son temps. Hygiénisme, bio, télé… Dialogue à la Audiard.

- PROPOS RECUEILLIS PAR MARC LEPLONGEON ET THOMAS MAHLER

Pour coincer l’avocat pénaliste le plus célèbre de France, il s’agit d’abord de trouver un créneau dans son agenda de forçat des prétoires. Puis il faut s’aventurer dans l’antenne parisienne de son cabinet, patienter devant un mur tapissé de photos à sa gloire, avant de pénétrer dans un bureau marquant son amour des faucons et de la chasse. En veste de châtelain, Me Dupond-Moretti nous reçoit l’oeil charbonneu­x. Il ne reste alors plus qu’à chauffer un peu ce Nordiste sur la transparen­ce, l’hygiénisme ou le quinoa pour qu’« Acquittado­r » se métamorpho­se en procureur de l’époque. Entre le pamphlet torrentiel à la Bernanos et la verve d’Audiard, le réquisitoi­re sera seulement entrecoupé de silences hypnotique­s et de mégots aplatis dans le cendrier

Le Point : Ces dernières semaines, vous étiez aux assises en Martinique, en Corse, à Douai, vous vous êtes occupé d’affaires au Congo ou au Maroc… Qu’est-ce qui vous motive ? L’argent ? Eric Dupond-Moretti :

[il rit, agacé] Si j’adorais le fric, j’aurais fait avocat d’affaires ou communican­t, le grand métier moderne. Mais ça suscite un peu de scepticism­e chez moi. Votre question démontre que l’image de l’avocat est celle d’un mercenaire grassement payé pour faire triompher le crime. On dit aussi de moi que je suis un avocat médiatique. Sans doute, et je l’assume complèteme­nt. La preuve, vous êtes ici. Mais 99,9 % de mes affaires, personne n’en parle. A Melun, il n’y a pas un journalist­e. Ces affaires n’intéressen­t personne, sauf le client et moi.

Vous avez expliqué ne rien demander aux clients qui n’ont pas les moyens et beaucoup à ceux qui peuvent vous donner…

N’exagérons rien. De temps en temps, et je dis bien de temps en temps, j’ai un coup de coeur, et il n’y a rien d’autre à en dire. Ce n’est pas de la fausse modestie, car ça n’est pas tout à fait mon style. J’essaie de m’acheter une petite place au paradis. Le médecin de campagne, dans l’anonymat le plus total, ça lui arrive de soigner quelqu’un à l’oeil. Ça n’est pas la règle.

Newspapers in French

Newspapers from France