L’écrivain entre dans la prestigieuse collection « Les Cahiers de L’Herne ». Un volume regorgeant d’inédits sur sa mère, son père, et d’échanges vigoureux avec ses contemporains. Extraits exclusifs.
«M onsieur Houellebecq, pourquoi écrivez-vous ? » A la question que lui pose l’hebdomadaire allemand Der Spiegel, en octobre 1999, voici ce que répond l’écrivain : « Je veux refléter le monde. » Dans la même interview, celui qui est alors l’auteur de deux romans, « Extension du domaine de la lutte » (1994) et « Les particules élémentaires » (1998), a aussi cet échange avec ses deux intervieweurs : « En théorie, les écrivains américains devraient être meilleurs que les écrivains européens. – Pourquoi ? – Parce que le pays est pire. » Tout Houellebecq est là : « refléter le monde » contemporain, mais surtout trouver le plus puissant des stimulants romanesques dans le « pire » de ce monde. En prendre non seulement acte, mais sa part, en s’y immergeant avec une grâce squalesque et par là réussir à s’en délecter. Du moins à nous le faire croire. Du supermarché aux filles numérotées de Pattaya, du rêve de clonage à celui d’une religion prenant en charge tant d’aspects de la vie de l’homme qu’elle offre enfin à celui-ci l’apaisement, Houellebecq aura été ainsi celui qui nous a fait prendre des horreurs pour des délices, avec un charme fou qui tient beaucoup à son humour ultranoir et à son sens du montage « cut » . Il ne faut pas oublier qu’il est un grand lecteur de Baudelaire, le poète qui a osé faire d’une charogne la nouvelle origine du monde. Voilà pourquoi le Cahier de L’Herne qui paraît le 4 janvier sous la direction d’Agathe Novak-Lechevalier, et dont nous vous livrons des extraits en exclusivité, est un événement pour qui est passionné par l’écrivain et ses livres. D’abord, parce que L’Herne va bien à celui qui, poète puis romancier, puis chanteur, puis réalisateur, puis acteur, puis artiste – sans jamais perdre aucune de ces identités – s’apparente de plus en plus à une hydre fascinante (avec ici, le « H » de Houellebecq en plus), une hydre dont il ne serait pas question de couper les têtes mais de regarder pousser, fasciné, les nouvelles. Ensuite, parce que regorgeant de contributions d’artistes (d’Iggy Pop à Emmanuel Carrère), mais surtout de textes inédits de l’écrivain, comme « Mourir », écrit en 2005, où il évoque sa mère et son père, cette très riche mosaïque houellebecquienne offre un éclairage sans pareil sur un créateur pour qui l’heure de la soumission à l’époque n’a décidément pas encore sonné