Mon père n’aimait rien tant que se comporter comme une espèce de beauf.
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« Quoique intelligent, subtil, capable même de pensées réellement originales (je me souviens par exemple de sa critique de l’“Ulysse” de Joyce, qu’il jugeait à certains égards surfait), mon père n’aimait rien tant que se comporter comme une espèce de beauf et se donner ainsi au spectacle sous les yeux médusés de ses amis qui, l’appréciant à juste titre pour son habituelle finesse de pensée, se montraient déconcertés par ce positionnement complexe. Je le revois par exemple affirmer qu’il n’y avait rien de tel dans la vie que d’assister à une étape du Tour de France ou à un bon match de foot, tranquille devant sa télé, avec un pack de bière ; et je le revois en donner, presque aussitôt, l’exemple.
C’était là chez lui, quand on y pense, une stratégie assez audacieuse, car il était réellement issu d’un milieu populaire et aurait donc normalement dû avoir le comportement d’un beauf. Pour pratiquer cette ironie à double détente, il fallait qu’il soit bien assuré de sa supériorité intellectuelle et qu’elle ne serait jamais remise en question. D’autant que ce n’était même pas, au fond, de l’ironie : il pensait qu’une étape du Tour de France ou un bon match de foot, en compagnie d’un pack de bière, sont réellement des choses bien agréables ; et le pire est qu’il avait raison. La différence étant qu’il pouvait, aussi, apprécier l’“Ulysse” de Joyce, tout en l’estimant par endroits surfait (le pire étant qu’il avait, là aussi, raison). Sur ce plan, sur ce plan précis, il est indiscutable que mon père a pu me servir de modèle. » (« Mourir I », inédit, 2005.) manger et boire. Mais si on en fait une représentation théâtrale, il devient une expérience creuse. »
« Je suis content que vous ayez eu d’aussi bonnes expériences sexuelles en Europe. Comme je m’intéresse à la situation du sexe en Europe depuis plus longtemps que vous, je dois malheureusement dire que la situation a empiré. Le sexe est bien mieux à Cuba. »
« D’accord. J’ai trouvé la France aussi très décevante. En Italie, les gens sont très détendus concernant le sexe ; en Irlande, ils boivent trop pour y arriver. Mais je tiens à souligner que je ne suis pas du genre à changer fréquemment de partenaires. »
« En ce qui concerne l’Irlande, je ne suis pas d’accord. Pour le sexe, c’est le bon moment là-bas parce que le catholicisme y est en recul. » (« Partout des images de sexe parfait ». Entretien avec Bret Easton Ellis paru dans Der Spiegel le 25 octobre 1999.)
Michel Houellebecq : B. E. Ellis : M. Houellebecq :