Le socialisme pour un seul pays
Le doux flirt entre Benoît Hamon et Jean-Luc Mélenchon n’aura pas été totalement vain. Il est apparu aux yeux de tous que ce qui les a empêchés de s’unir n’était pas les idées – les obstacles sur le fond ne paraissaient pas insurmontables –, mais une affaire de politique et de perspectives personnelles. Il y a donc en France désormais un équivalent du parti allemand Die Linke, mais trois fois plus gros : environ 25 %, selon les sondages. Certes, il existe côté Hamon une part de socialistes captifs du parti, qui ne partagent pas forcément les orientations de leur candidat. Il n’empêche, cela fait beaucoup. Notons que cette gauche-là est moins anticapitaliste – peu de nationalisations dans ses programmes – qu’antilibérale. Un peu de protectionnisme, donc, afin de tenir à l’écart les produits fabriqués par plus pauvres que nous. Jules Renard riait de ce réflexe : « Les bourgeois, ce sont
les autres. » Telle est la loi du socialisme pour un seul pays qui semble la règle de cette nouvelle gauche. Jean-Luc Mélenchon, autrefois, laissait plus paraître son internationalisme, hérité sans doute du trotskisme. Mais aujourd’hui sa compassion s’arrête aux frontières, et on se demande bien ce qui différencie sa philosophie du slogan trumpien : « America first ». Benoît Hamon, de son côté, assure ne pas vouloir « briser le rêve européen ». Mais il envisage sans complexe une restructuration de la dette française, c’est-à-dire un bras d’honneur à nos partenaires, et très certainement une sortie de l’euro. Cette nouvelle gauche à 25 % fait toutefois preuve d’un certain sens du libre-échange : celui des idées. Elle a fourni à Marine Le Pen un programme économique et a reçu en retour une forme de nationalisme, même en sourdine. La seule concession que ces deux camps ont faite au marché…