« Un instrument d’émancipation, pas un prix de consolation »
Les universitaires Yannick Vanderborght et Philippe Van Parijs défendent, dans leur livre « Basic Income », leur conception d’un revenu inconditionnel qui accorderait à chaque citoyen une liberté de vie réelle.
La période a propulsé le revenu universel, avec sa mise en avant par le candidat Benoît Hamon, au premier rang des discussions politiques. Fable irréaliste et nocive, soutiennent les uns. Projet nécessaire et crédible, avancent les autres. La réflexion, dont l’origine est multiséculaire, fait l’objet de propositions et discussions toujours plus documentées un peu partout dans le monde. Un livre majeur, véritable traité du dossier, « Basic Income. A Radical Proposal for a Free Society and a Sane Economy » (Harvard University Press), permet d’y voir clair. Socle de la « liberté réelle » selon Philippe Van Parijs et Yannick Vanderborght, le revenu universel ne relève pas du bricolage socio-fiscal. Audelà de l’assurance et de l’assistance, une telle option invite à réviser les principes fondamentaux de la protection sociale. Alors que le projet n’a jamais été aussi présent dans les disputes politiques, leur ouvrage captivant revient sur sa justification éthique, sa soutenabilité économique et sa faisabilité politique. Que l’on soit pour ou contre l’idée d’un revenu universel inconditionnel et individuel, fixé autour de 25 % du PIB par tête (soit entre 600 et 700 euros par mois en France), ses enjeux et traductions concrètes méritent d’être connus. Pour être mieux débattus
Le Point : L’idée de revenu universel a-t-elle vraiment un demi-millénaire ? Yannick Vanderborght :
On entend parfois dire qu’on trouve la première trace de défense d’un revenu garanti dans « Utopie », de Thomas More, publié en 1516. More y affirmait qu’une aide aux plus démunis était plus efficace que la peine de mort pour prévenir la criminalité. D’autres archéologues de l’idée vont puiser dans la préhistoire des mécanismes d’assistance et d’assurance sociales. Ils étudient par exemple les Poor Laws (Lois sur les indigents) anglaises et l’expérience de complément de revenu pour travailleurs pauvres mise en place par les magistrats de Speenhamland en 1795. Mais il s’agit évidemment de prestations conditionnelles. L’idée de revenu universel inconditionnel telle que nous l’entendons n’émerge qu’à la fin du XVIIIe siècle et ne