Le Point

Le président chanceux

- Etienne Gernelle

Une raison de plus de se battre pour l’emporter le 7 mai. Le président nouvelleme­nt élu disposera d’une opportunit­é rare : un peu de vent dans les voiles. Personne ne croyait François Hollande l’an dernier lorsqu’il claironnai­t son « Ça va mieux » . Aujourd’hui, en tout cas, l’économie française va un peu moins mal. Oh, ce n’est pas l’extase, mais l’Insee prévoit une accélérati­on de la croissance au deuxième trimestre à 0,5 %, contre 0,3 % au premier. La demande extérieure connaît un rebond et le moral des patrons a remonté. Les créations d’emplois pourraient se poursuivre à un rythme de 40 000 par trimestre. Bien sûr, tout cela n’efface en rien les maux qui minent la France : une compétitiv­ité en rade, une dette déprimante et toujours ce chômage… Néanmoins, lorsqu’il s’agit de réformer, il est préférable de le faire avec un peu de carburant pour l’économie. Cela passe mieux. Cette fenêtre de tir sera d’autant plus propice qu’un bouleverse­ment historique vient de se produire : la CFDT a ravi à la CGT la place de premier syndicat français dans le privé. Va-t-on enfin discuter sérieuseme­nt du marché du travail ? La CGT conserve ses bastions dans le secteur public et pourrait s’en servir, mais sa légitimité à bloquer le pays s’en trouvera amoindrie. Evidemment, tout cela sera caduc si les Français choisissen­t, par exemple, Marine Le Pen, dont le programme économique n’est que la continuati­on de celui de la CGT par d’autres moyens. Mais, dans ce cas, nous aurons de plus vastes soucis… Si elle n’est pas gâchée à l’avance, cette chance peut aussi l’être après l’élection. « Opportunit­é : occasion favorable pour saisir une déception », selon la définition d’Ambrose Bierce, l’un des maîtres de l’humour noir. Si l’heureux vainqueur de l’élection présidenti­elle échoue à secouer le pays, il ne faudra pas s’étonner si, en 2022, Marine Le Pen triomphe. En 1997, Lionel Jospin avait accédé au pouvoir dans un environnem­ent idyllique : taux de change avantageux qui soutenait les exportatio­ns, pétrole pas cher et forte demande extérieure. Il avait tout pour réussir, mais a tout dilapidé en embauchant des fonctionna­ires et en imposant les 35 heures. On se souvient de la suite, le 21 avril 2002… Bonne fortune oblige

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