Le populisme chic, par Sébastien Le Fol
Les questions culturelles travaillent en profondeur les démocraties occidentales. Les défenseurs de la société ouverte ont trop souvent tendance à négliger ces préoccupations. Ils s’en remettent à Uber et aux start-up pour apaiser les tensions et assurer la bonne marche du « vivreensemble ». En France, il y a encore beaucoup à faire pour libérer l’économie de ses carcans et débloquer une société favorisant la rente. « Pour un jeune, il est plus facile de trouver un client qu’un employeur », a résumé Emmanuel Macron. Le défi est là. Mais pas seulement. Notre pays est aussi lézardé par des fractures identitaires. Le discours économique ne suffit pas à y remédier. Les libéraux peuvent-ils aussi apporter une réponse culturelle aux maux de la « France périphérique » théorisée par Christophe Guilluy ? C’est le sujet des travaux du Britannique David Goodhart. Créateur de la revue « Prospect », ce brillant essayiste avait en 2014 hérissé ses amis de gauche avec « The British Dream », un livre mesurant les effets du multiculturalisme sur l’Etat providence. Avec « The Road to Somewhere », il explore aujourd’hui cette division qui tra- verse, selon lui, les sociétés occidentales, entre les « anywheres » (les déracinés, mobiles socialement et géographiquement) et les « somewheres » (les enracinés, attachés à leur identité et aux valeurs traditionnelles). Goodhart veut convaincre les libéraux d’adopter certaines idées des « somewheres ». Il plaide pour un « populisme décent », susceptible d’endiguer le populisme actuel. Ses solutions sont très critiquables, mais qu’un libéral s’interroge sur certains effets de la mondialisation est salutaire. Pour un amoureux de la libre pensée, il ne doit pas y avoir de dogme