Le Point

Fonds flexibles Le grand écart

Les fonds patrimonia­ux sont de plus en plus accessible­s. A ne pas souscrire les yeux fermés.

- PAR ÉRIC LEROUX

Une progressio­n de 28 % sur un an pour le meilleur fonds flexible (R Valor), mais 7 % de perte sur la même période pour le moins bon (FRM Global Macro) : le moins que l’on puisse dire, c’est que cette nouvelle génération de fonds, très à la mode, est loin d’être homogène : 35 % d’écart sur douze mois dans une même famille de fonds collectifs, c’est en effet un record ! Dans ces conditions, mieux vaut prendre de sérieuses précaution­s avant d’y investir…

Sur le papier, les fonds flexibles apportent de vraies réponses aux attentes des épargnants, en leur permettant de confier la stratégie et la tactique à un gérant profession­nel. C’est lui qui, selon les conditions du marché, va choisir d’investir totalement en actions ou au contraire mettre tout l’argent à l’abri, et qui va aller ensuite chercher dans chaque classe d’actifs (actions, obligation­s, etc.) le créneau le plus porteur du moment, en privilégia­nt par exemple les petites valeurs par rapport aux grosses capitalisa­tions, ou l’inverse. Bref, pour des épargnants qui n’ont pas les connaissan­ces ou le temps pour gérer activement un portefeuil­le, c’est une solution très tentante.

Dans les faits, mieux vaut se méfier : « Tous ne font pas le job, car ils n’utilisent pas tous leur flexibilit­é », juge Jean-Paul Raymond, directeur de Quantalys, société d’analyse de fonds et de constituti­on de portefeuil­le, qui étudie cette famille depuis plusieurs mois au sein d’un observatoi­re de la gestion flexible.

Pour y voir clair dans cette galaxie, mieux vaut donc commencer par préciser certains

points. « Il existe trois grandes sous-familles de fonds flexibles, explique Jean-Paul Raymond. Un tiers environ sont de vrais flexibles, qui font bouger régulièrem­ent leur allocation ; un deuxième tiers est en permanence fortement investi en actions ; le dernier tiers est plutôt prudent, avec une exposition limitée aux actions – ce sont ceux que l’on appelle souvent “fonds patrimonia­ux” car le niveau de risque est maîtrisé. » Les fonds flexibles se distinguen­t ensuite par leur rayon d’action géographiq­ue : certains se cantonnent à l’Europe et à la zone euro, pour éviter les risques de change, alors que d’autres ont fait du monde entier leur terrain de jeu. Ils disposent de plus d’opportunit­és mais, en contrepart­ie, sont plus risqués.

L’une de ces sous-catégories estelle meilleure que les autres ? Non, car tout dépend des périodes prises en compte. Depuis un an, ce sont les fonds les plus investis en Bourse qui affichent les meilleurs résultats, portés par les bonnes performanc­es des marchés d’actions, alors que les plus prudents sont en retrait. Idem sur cinq ans. Mais, si les marchés se retournent demain, il est probable que les résultats s’inverseron­t, comme ce fut le cas au début de 2016 : nombre d’entre eux ont accusé des baisses de 10 à 20 % quand les marchés se sont « enrhumés », avant de se redresser par la suite.

Ouvrir le capot. « Fonds flexible ne veut pas dire fonds prudent, rappelle Jean-Paul Raymond. Il existe des fonds très risqués, comme H2O Multistrat­égies, qui peuvent perdre 10 % de leur valeur en une journée et regagner 30 % en peu de temps. » C’est pourquoi, avant d’investir, il est important d’« ouvrir le capot » du fonds et de comprendre son fonc- tionnement. En effet, certains fonds s’affirment flexibles par facilité, de façon à ne pas avoir à changer leur nature dès qu’ils veulent explorer une autre classe d’actifs, mais qui, en attendant, sont gérés comme des fonds classiques, en actions ou en obligation­s. La lecture du prospectus légal vous apportera un premier éclairage sur la nature véritable du fonds et sa politique de gestion. Vous devrez ensuite observer son niveau de risque, exprimé sous forme de volatilité. « Les fonds flexibles prudents ont une volatilité comprise en 3 et 7 %, alors que les fonds plus investis en actions affichent de 10 à 17 % de volatilité, soit un ratio comparable aux 15 % des actions », éclaire Jean-Paul Raymond

« Fonds flexible ne veut pas dire fonds prudent. Certains sont très risqués. » Jean-Paul Raymond, directeur de Quantalys

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