Le Point

Chronique de la pensée multiple

Quel président pour la France ?

- Par Valéry Giscard d’Estaing

La France est bien malade. Les Français le savent. Vont-ils faire le nécessaire pour la guérir ? Le problème central est que l’économie française, jadis puissante, n’est plus compétitiv­e. Regardez autour de vous. La plupart des produits ou des objets que vous utilisez sont fabriqués à l’étranger. D’où le déficit extérieur et le chômage.

La présidence sortante, la plus faible de la Ve République, s’est engagée à réduire le chômage : celui-ci reste aujourd’hui le plus élevé de toutes les puissances économique­s, Etats-Unis, Allemagne et Grande-Bretagne, et il pèse lourdement sur le budget en augmentant la dette qui vient d’atteindre un niveau record. Il ne pourra diminuer que si la France retrouve l’expansion.

Certains candidats à la présidence de la République proposent pour cela la sortie de l’Europe et l’abandon de l’euro. C’est une absurdité ! La France n’a connu la croissance qu’avec une monnaie forte. L’abandon de l’euro ramènerait la France dans une spirale de dévaluatio­ns, telle qu’elle l’a connue avec trois dévaluatio­ns successive­s dans les années qui ont suivi l’élection de François Mitterrand, et qui ont appauvri d’autant les Français.

Les grandes institutio­ns nécessaire­s au bon fonctionne­ment d’une démocratie, qui sont l’éducation et la justice, sont dégradées. L’éducation, qui a été une des premières d’Europe, figure maintenant en queue des classement­s, et la justice paraît avoir abandonné la règle d’or du secret de l’instructio­n.

Sur le plan extérieur, la situation n’est guère meilleure. La France est devenue invisible. Elle n’exerce plus en Europe, bien qu’étant un pays fondateur, aucune des quatre présidence­s jadis confiées à Simone Veil, Jacques Delors et JeanClaude Trichet. En cinq ans, le président français n’a pris aucune initiative pour faire avancer l’intégratio­n de la zone euro, vitale pour notre avenir, et a laissé se creuser l’écart économique entre la France et l’Allemagne. Alors, qui choisir comme président ? Il lui faut trois qualités : la conviction, la déterminat­ion et l’expérience.

La conviction que la France peut guérir si le bon diagnostic est posé sur les maux dont elle souffre.

La déterminat­ion pour appliquer les remèdes nécessaire­s, sans se laisser bloquer par les multiples intérêts et lobbys. Mais la société française est une société sensible, et cette déterminat­ion doit s’exercer avec compréhens­ion et humanité.

Enfin, l’expérience est indispensa­ble. Il ne faut pas faire payer au pays le coût de ses improvisat­ions personnell­es ! L’expérience ne s’acquiert qu’avec une longue présence dans les hautes fonctions gouverneme­ntales pour apprendre la bonne manière de gouverner et de gérer une majorité parlementa­ire. J’étais jeune lors de mon élection à la présidence de la République, mais j’avais servi sept ans auprès du général de Gaulle et cinq ans auprès du président Georges Pompidou.

Puissent les Françaises et les Français rechercher ces qualités lorsqu’ils feront leur choix.

La France est bien malade. Il n’y a que le peuple français qui puisse la guérir

Il lui faut [au futur président] trois qualités : la conviction, la déterminat­ion et l’expérience.

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