Mère de famille.
l’inhumanité du monde carcéral lui inspirent un engouement à renverser des montagnes.
« On n’a pas le droit de nier sa dignité à l’être humain quand il est prisonnier » , répète-t-elle au long de ses visites incessantes. Le papier à lettres du ministère porte encore l’en-tête de « L’Etat français » – avec la mention « Vichy, le… » –, mais elle va de l’avant. De la soupente qui lui sert de bureau, place Vendôme, elle engage des révolutions contre l’indifférence : les prisons écoles, les centres médico-psychologiques, l’amélioration de l’hygiène, le sort des femmes détenues. Durant la guerre d’Algérie, elle contribue à l’obtention du statut de prisonniers politiques pour les activistes du FLN.
En 1964, elle change d’univers : la voici à la Direction des affaires civiles, où le ministre Jean Foyer prépare la réforme du Code civil. « Mme Veil », comme on l’appelle désormais avec respect à la chancellerie, est chargée du dossier délicat de l’adoption. Une fois de plus, elle bouscule les conservatismes de la France catholique de l’après-guerre, arc-boutés sur le modèle de la famille traditionnelle. Elle leur oppose une vision plus pragmatique que réellement libérale : « L’adoption est faite pour l’enfant. » Pour la première fois, les députés découvrent cette jeune femme volontaire au banc du gouvernement, où elle chuchote à l’oreille de Foyer durant les débats – qui sont rudes. La majorité est réticente, mais de Gaulle et Pompidou (qui a lui-même un fils adop- « Tel est le grand avantage d’avoir des enfants tôt : nous sommes maintenant mariés depuis soixante ans et comptons une douzaine de petitsenfants et quelques arrière-petitsenfants. » (« Une vie », 2007) tif) veulent la réforme ; ils imposent le vote. C’est la première empreinte de Simone Veil sur la société française. Il y en aura d’autres.
Influence grandissante Après Mai 68, dont elle a goûté l’enthousiasme contestataire mais non les débordements ni le sectarisme, elle quitte le Syndicat de la magistrature, qu’elle juge trop gauchiste, et entre au cabinet de René Pleven. Elle se dit « aussi mal à l’aise avec la droite moraliste qu’avec la gauche sectaire ». De Gaulle a démissionné, désavoué par un référendum auquel les Veil ont voté non – « moins à cause de la réforme du Sénat, qui ne me concernait guère plus que les autres Français, expliquera-t-elle, que pour la manière dont il usait du référendum, test plébiscitaire de sa légitimité. » (4) Georges Pompidou s’est installé à l’Elysée. Il s’est pris d’affection pour elle. En 1970, il nomme Simone Veil au Conseil supérieur de la magistrature, qu’elle est la première femme à présider. Il la reçoit régulièrement en tête à tête,
Durant la guerre d’Algérie, elle contribue à l’obtention du statut de « prisonniers politiques » pour les activistes du FLN.