Un « paternalisme libertaire »
Le débat autour de la revalorisation de la réussite individuelle est un thème bien de chez nous, et non pas une importation des valeurs américaines. Le mot-clé derrière tout cela, c’est le vieux mot d’« effort ». Le seul emprunt aux Etats-Unis est cette influence sur Macron et ses collaborateurs de la théorie du nudge, ce petit coup de coude que l’on donne pour encourager à l’effort, idée empruntée à Cass Sunstein, un des théoriciens du « paternalisme libertaire ». Selon lui, il faut penser en même temps les réformes et la manière de les faire passer, trouver donc un mode d’incitation pour qu’elles soient acceptées. La réussite est le mode d’incitation trouvé par Macron pour habiller l’effort et revaloriser le travail.
Mais l’habillage est risqué. Justifier la réussite individuelle par la réussite collective, c’est très bien. La justifier par la réussite individuelle seule, c’est un déficit de communication, même si, en parlant de l’école, en soulignant que 99 % des parents veulent la réussite de leurs enfants, il a réintroduit du « collectif ». Le tout est de donner l’impression qu’un consensus préétabli existe pour que chacun ait envie d’y contribuer. Car deux mécanismes fondamentaux régissent la vie publique : la force d’inertie et l’instinct grégaire, l’envie d’être inclus, reconnu. Dans sa communication, Macron aurait intérêt à englober davantage la part historique de la réussite collective dans notre pays. Sinon, il risque de ne pas être compris à gauche. Il y a d’autant plus intérêt que sa matrice idéologique est réformiste. Elle repose sur l’idée centrale qu’une société ne peut survivre sans un renouvellement régulier de ses élites. Elle doit