Le bois sort du bois
Léger, écolo, hightech, ce matériau cumule les atouts de construction.
C’est un signe qui ne trompe pas. Du 12 au 15 septembre, Bordeaux accueillera le Salon Woodrise 2017 : premier congrès mondial consacré aux immeubles en bois de moyenne et grande hauteur. Cette manifestation d’envergure, organisée par l’institut technologique français FCBA, avec de nombreuses délégations étrangères (Canada, Japon, etc.), se veut une vitrine inédite montrant tout le formidable potentiel technique, économique et environnemental d’un matériau vert(ueux), nouvel acteur majeur de la ville durable et des territoires.
« La France cumule actuellement pas moins de 28 concours d’architecture de bâtiments en bois comptant entre 10 et 15 étages. Cette accélération ne doit rien au hasard. Elle rés ul t e d’ une vol o nt é pol it i que e t réglementaire qui s’inscrit dans le sill age du s o mmet pari si e n de l a COP21 visant à limiter d’urgence le réchauffement climatique planétaire », analyse l’architecte Pascal Gontier, professeur à l’école d’architecture de Nantes, récemment primé pour le laboratoire universitaire Max-Weber, à Nanterre, ent iè r e me n t co n ç u av e c un e structure en bois. Fini, le temps du confinement géographique aux seuls périmètres des chalets de montagne. Si le bois sort enfin du bois, c’est aussi parce qu’il représente un bel eldorado en puis- sance, à travers le développement des filières françaises locales auj ou r d ’ h u i en c o r e la r g e ment sous-exploitées : forêts, scieries, usines d’assemblage, etc.
« Hip hip hip hourra pour le bois ! C’est un matériau alternatif léger, monté à sec, qui séquestre du CO2 et qui sent bon », s’enthousiasme l’architecte Jean-Paul Viguier. Il faut dire que son euphorie est en partie due à la tour résidentielle en bois de 17 étages, « la plus haute du monde » , qu’il devrait inaugurer à Bordeaux à l’horizon 2020. « Gymnases, piscines, auditoriums… Le bois offre des grandes portées ad hoc. La nouveauté vient surtout de ces modes de construction innovants qui utilisent des panneaux préfabriqués en bois massif lamellé croisé (Cross Laminated Timber) pour bâtir avec précision, vite et sans poussière. » A la clé, le stockage du carbone, qui s’ajoute au fait que l’arbre a grandi en consommant du CO2 et en rejetant de l’oxygène.
Pin et bitume. Noir, c’est noir, telle pourrait être la devise de l’architecte Odile Decq, qui, fidèle à son habitude, a signé en 2015 une résidence d’artiste « noir corbeau » au-dessus de la vallée de Grenoble, face à la chaîne de Belledonne. En dehors du socle en béton, sa partie émergée s’articule autour d’une classique charpente en bois habillée d’éléments internes en contreplaqué. « A l’extérieur de ce monolithe sculptural, j’ai utilisé du pin des Alpes bitumé avec un goudron de Suède dont on se sert habituellement pour calfater l’intérieur des bateaux. Ce revêtement qui protège le bois lui confère aussi une allure différente. »
A rebours de l’« architecture Lego », faite de béton et de parpaings, bâtir en bois, c’est
avant tout construire en structure comme un jeu de Meccano. « Léger, écolo, résistant au feu… Contrairement aux idées reçues, le bois est un matériau high-tech qui offre toutes les audaces constructives, notamment grâce aux nouvelles technologies numériques de conception, de préfabrication et d’assemblage », assure Pascal Gontier, qui déplore toutefois qu’en dépit de progrès en la matière il faudrait diminuer les produits d’imprégnation visant à lutter contre les insectes et les champignons, car leur bilan écologique est contestable. En dehors de cette remise en question, d’autres arguments physiolo-
giques plaident en faveur du bois. Cerise sur le gâteau : ce régulateur thermique, qui absorbe et rejette l’eau, posséderait aussi des vertus de régulation cardiaque. « Le bois diminue le stress des occupants des immeubles construits dans ce matériau et même le taux d’absentéisme des personnes qui y travaillent ! » assure Pascal Gontier. Ce qui est indéniable, c’est qu’une atmosphère boisée, cosy et chaleureuse participe d’un véritable art de vivre et fait l’unanimité de ceux qui l’ont testée
A lire : « 100 bâtiments contemporains en bois », Taschen, 2 volumes, 656 p., 39,99 €.