Le Point

L’honneur perdu des Insoumis

- Etienne Gernelle

Elles pleuvent, elles dégoulinen­t : impossible d’y échapper. A longueur de journée, il nous faut recevoir les leçons de morale des autoprocla­més Insoumis. Etrange, au passage, de s’arroger ainsi le monopole de l’insoumissi­on, comme si tous les autres étaient des caniches. Parmi les caniches, en tout cas, se trouvent des indignés, des vrais, qui s’émeuvent de la dictature en train de s’installer au Venezuela. Après avoir mené à la faillite un pays disposant des plus grandes réserves de pétrole du monde – un exploit réalisé sur fond de corruption massive –, Nicolas Maduro et sa clique de « chavistes » répriment dans le sang les affreux « réactionna­ires » qui ont eu le mauvais goût de s’en offusquer. Le président vénézuélie­n partage avec son mentor et prédécesse­ur Hugo Chavez le goût pour la démagogie économique et pour le coup d’Etat. C’est donc avec applicatio­n que Maduro oppose la force à la majorité parlementa­ire élue, bafoue les règles démocratiq­ues les plus élémentair­es en bricolant une grotesque « Constituan­te ». Des méthodes d’un autre siècle. Et tout cela, bien sûr, dans le silence absolu des chavistes français, parmis lesquels on trouve quelques éléments issus du Front national – Florian Philippot avait manifesté son immense chagrin à la mort de Chavez –, mais surtout des adeptes de la France insoumise. Jean-Luc Mélenchon n’a jamais varié dans son soutien en bloc à la révolution bolivarien­ne. Nos chers Insoumis sont donc des Robins des bois à géométrie variable, qui promettent des barricades à Paris pour protester contre l’instaurati­on d’un barème d’indemnités prud’homales, mais traitent avec mépris les émeutes à Caracas contre un président qui affame son peuple et piétine sa liberté. Deux enseigneme­nts s’imposent : d’abord, ne jamais oublier que le stade suprême de l’antilibéra­lisme est toujours la tyrannie ; ensuite, mieux vaut apprendre à écouter d’une oreille distante les sermons de ces Insoumis ici, mais beaucoup moins ailleurs. Personne ne leur demande d’abjurer leur guignolesq­ue idéologie, mais simplement de reconnaîtr­e que rien ne justifie la dictature

Newspapers in French

Newspapers from France