Le Point

Papa Trigano en pince pour Mama Shelter

L’ancien PDG du Club Med a lancé, avec ses enfants, cette chaîne à succès.

- PAR ANDRÉ TRENTIN

Aenviron 300 mètres de l’église où a été tournée la scène fina l e de s « To nt o ns fl i ngueurs », si vous passez une tête à l’hôtel Mama Shelter de Bagnolet, vous aurez sûrement l’occasion de voir la grande carcasse d’un bonhomme timide et emprunté qui sourit à tout le monde. Serge Trigano est ici chez lui. Tags ou inscriptio­ns sur les plafonds, sur le mur des chambres, sur les tapis, sur les parois de l’ascenseur… Cool et branché, le Mama Shelter a ouvert en 2008 à l’emplacemen­t d’un ancien parking, dans un quartier qui conserve ses côtés popu. On pourrait le croire fréquenté uniquement par des hipsters ou des bobos. Mais, dans ce décor déjanté, avec bouées en plastique au plafond, tables de 8 mètres de longueur, four à pizza et bar à bières, Trigano réussit à faire venir aussi des hommes d’affaires, des gens du coin, des étudiants, des grandsmère­s et leurs enfants… Un petit monde qui, en fin de semaine, s’éclate en musique. Le Mama Shelter, un doux bazar, quoi. L’invention de Serge, qui, vingt ans après avoir été viré du Club Méditerran­ée, revit enfin : le Mama de Bagnolet a fait des petits en France et ailleurs. Au point que le géant hôtelier Accor s’est invité au tour de table. Une arrivée qui risque de tout chambouler.

Pour Serge Trigano, 71 ans, le monde s’est effondré ce jour de février 1997 quand, PDG du Club Med, il a été renvoyé brutalemen­t à ses études. Le Club, fondé par son père, Gilbert, c’était tout pour lui, les vacances, les amis, la famille… Il y a passé trente ans. C’est même au Club qu’il a rencontré Gisela, sa femme, un mannequin allemand qui faisait des shootings à Agadir. Alors, la rupture… « J’étais paumé, écoeuré, je tournais en rond. Je me disais “ce n’est pas vrai, ils se sont trompés ,ils vont me rappeler”. » Le début d’une sale galère, en fait. Il engloutit ses indemnités du Club (5 millions d’euros) dans un projet de resort avorté à Marrakech. Vend son appartemen­t de la place des Etats-Unis, à Paris, pour une location près de la porte Maillot. Accepte des missions au cas par cas. Autour de lui, hormis quelques exceptions comme Isidore Partouche, qui lui confie la supervisio­n d’un 3-étoiles en Normandie, tout le monde se défile. Il ne peut compter que sur ses proches et ses fidèles du Club. C’est l’époque où dit-il, « j’avais doublé ma dose de somnifères ».

Films X. Mais le déclic aura finalement lieu avec l’invention du Mama, nouveau concept d’hôtel urbain. L’idée de Serge Trigano ? « Il n’était pas question d’ouvrir des hôtels sans âme comme ceux que proposent les chaînes des grands groupes. » Mais d’offrir un peu de luxe et de fantaisie à des prix abordables. Le prix des chambres, chacune ayant un agencement différent, commence à 79 euros, avec une moyenne à 129. Toutes sont équipées d’un iMac géant qui sert d’ordi et de télé (avec films X en accès libre). A la réception, une boutique vend pêle-mêle gadgets, sex-toys, produits cosmétique­s bio…

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