L’héroïsme en 2017
Les joutes intellectuelles autour des extravagances footballistiques donnent envie de se taper sur les cuisses. La nouvelle représentation de ce spectacle hilarant a pour sujet le transfert mirobolant du joueur brésilien Neymar au PSG. Moralisateurs et imprécateurs s’exhibent sur la pelouse médiatique. C’est un festival de lieux communs et de balivernes. « Pouvoir de l’argent », « opium du peuple », « mondialisation folle »… Toujours les mêmes banderoles. Au milieu des postures, un argument jaillit : les footballeurs seraient de faux héros. Qu’est-ce qu’un héros en 2017 ? Selon l’historien écossais Thomas Carlyle (1795-1881), qui inspira Proust et Pessoa, l’héroïsme est « un flambeau qui étincelle naturellement grâce à un don des Cieux » (1). Imprégné d’une vision aristocratique et stoïcienne, Carlyle célébrerait-il Neymar dans les mêmes termes que Cromwell, Dante, Shakespeare, Voltaire, Rousseau et quelques autres ? Il y a du divin dans la relation des petits princes du ballon rond avec leurs supporteurs. Mais ils sont bien trop encombrés de leur « moi » pour prétendre à ce rang. Leur vie n’est pas un « apostolat ». Implicitement, les pourfendeurs du transfert de Neymar reconnaissent un besoin de héros. L’héroïsme serait-il à nouveau de saison ? Une certaine historiographie avait chassé les « grands hommes » des manuels, leur déniant tout rôle dans la marche de l’Histoire au profit des « masses » et des « forces économiques ». Finalement, la polémique Neymar n’aura peut-être pas été aussi vaine : c’est un éclair dans un ciel trop gris 1. « Les héros » (Maisonneuve et Larose, 1998).