Vaccinons-nous contre l’obscurantisme ! par Sébastien Le Fol
En dépit des avions ou des produits de luxe vendus par la France dans le monde, notre balance commerciale fait grise mine. Il est un domaine, pourtant, où nos exportations s’améliorent : les maladies contagieuses. Une famille française vient ainsi de réintroduire la rougeole au Costa Rica. Dans un récent rapport, l’Unicef s’alarme de la recrudescence mondiale de cette maladie. Les trois quarts de l’augmentation des cas se concentrent dans une dizaine de pays : Brésil, Ukraine, Yémen… et France. Une belle réussite des opposants à la vaccination. Au royaume de Pasteur, les antivaccins inoculent leurs fariboles. Selon la dernière enquête de la Fondation Jean-Jaurès et de Conspiracy Watch sur l’audience des thèses conspirationnistes, 43 % des Français pensent que « le ministère de la Santé est de mèche avec les laboratoires pharmaceutiques pour cacher au grand public la réalité sur la nocivité des vaccins ». Il suffit de taper « dangers vaccins » sur Internet pour mesurer l’influence des marchands d’apocalypse. Les sociologues travaillant sur les croyances ont démontré à quel point nous étions perméables à ces discours alarmistes rédigés dans un style pseudoscientifique. Nous sommes infestés de biais cognitifs. Ainsi croyons-nous désormais qu’il y a plus de risques à se faire vacciner qu’à être contaminé par une maladie. C’est la raison pour laquelle de nombreux parents négligent de faire vacciner leurs enfants. Il est préoccupant de voir à quel point le discours scientifique est dévalorisé. Des scandales sanitaires l’ont certes affaibli, mais nous vivons une incroyable régression. La connaissance s’efface devant le ressenti, la suspicion. Internet consacre le relativisme des points de vue. Il y a peu, nous donnions des leçons aux Africains, les jugeant incapables d’endiguer le virus Ebola. Mais nous nous comportons comme des enfants laissés seuls trop longtemps dans un magasin de jouets, pour paraphraser un personnage de « Millenium people », le roman prémonitoire de J. G. Ballard
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