Quand l’autisme change le regard sur le handicap
La classification de l’autisme comme source de handicap a permis aux associations de parents de rompre avec les représentations de l’autisme comme maladie mentale, et aux personnes autistes capables de s’exprimer, de témoigner publiquement. La médiatisation orientée vers le syndrome d’Asperger a mis l’accent sur leurs capacités singulières, leur mémoire étonnante, leur méticulosité ou leurs aptitudes de calcul exceptionnelles. Cette mise en avant, alimentée par des films et des séries télévisées, participe à la construction de l’autiste geek et de l’« intelligent atypique », capables de saisir ce que les neurotypiques ne voient pas. Le concept de « neurodiversité » a vu le jour et nourrit les réflexions d’autistes qui se regroupent, militent et produisent un discours de type culturaliste, insistant sur les aspects positifs de la différence. Que les personnes autistes aient cherché à produire une expertise pour se démarquer du biais normatif du modèle médical est salutaire. Mais il semble que l’on soit passé d’un extrême à l’autre. C’est négliger le degré des difficultés et exclure ceux qui n’ont pas les compétences des personnes identifiées Asperger. Par ailleurs, des personnes qualifiées autrefois d’« introverties étranges mais douées se sentent stigmatisées, car désormais considérées comme souffrant de troubles autistiques », analyse la sociologue Brigitte Chamak. Enfin, des neuroatypiques à haut potentiel se retrouvent catalogués dans la case « handicapé » dont ils veulent absolument sortir.