La start-up qui transforme le plastique en or
L’auvergnat Carbios a inventé un procédé qui recycle le plastique à l’infini. Révolutionnaire.
Deux chiffres suffisent à comprendre : 348 millions de tonnes de plastique sont produites chaque année dans le monde, dont 75 millions de tonnes de polyéthylène téréphtalate (PET), que l’on retrouve essentiellement dans les bouteilles, emballages alimentaires et autres textiles via le polyester. Un cauchemar environnemental – 70% des déchets en plastique ne sont pas recyclés, nul procédé n’ayant vraiment fait ses preuves. Aucun ? Pas tout à fait ! Le salut pourrait venir d’une petite start-up implantée au pied des volcans d’Auvergne, sur le biopôle de Saint-Beauzire, près de ClermontFerrand. A force d’essais menés, notamment, en collaboration avec l’Insa de Toulouse, la société Carbios a développé un procédé à base d’enzymes. Une innovation qui permet de « déconstruire » les PET usagés, qui peuvent ainsi être réutilisés pour produire un plastique de haute performance.
Pour la première fois dans l’histoire de l’industrie, il devient ainsi possible de recycler à l’infini des déchets plastiques en nouvelles matières plastiques sans faire de tri préalable, en tirant profit de la sélectivité naturelle des enzymes. « L’enzyme entre dans le polymère comme une clé dans une serrure. Nous avons fait des milliers de modélisations pour que serrure et clé ne bougent plus, et nous y sommes parvenus. L’idée, ce n’est plus d’utiliser du pétrole pour produire du plastique mais des déchets en plastique. Et ce à l’infini », promet Carbios. Une révolution.
« Le principe est simple. Imaginez un collier de perles noires et blanches. L’enzyme que nous produisons agit comme un ciseau. Elle coupe le fil du collier, les perles tombent, sont séparées, puis purifiées. Identiques à celles d’origine, elles vous permettent de refaire le même collier à l’infini », sourit Jean-Claude Lumaret, 62 ans, directeur général de Carbios, qui savoure cet incroyable résultat scientifique. « Lorsque j’ai créé
Carbios en 2011, je suis parti d’une page vierge, raconte ce Marseillais au tempérament débonnaire, amateur de plaisance. Un jour, j’étais sur mon bateau à Bandol et j’ai vu passer un plastique. J’ai eu le déclic ! J’en avais vraiment marre de voir tous ces déchets partout. Je me suis dit qu’il fallait qu’on trouve une solution. »
A l’époque, Lumaret vit dans le nord de la France, où il travaille depuis trente ans pour le groupe Roquette, l’un des pionniers dans les nouvelles protéines végétales. Directeur d’une unité d’exploitation, il connaît très bien ce domaine d’innovation. Au hasard de ses rencontres, il se lie d’amitié avec le patron de la start-up
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L’opération se fait sans tri préalable, en tirant profit de la sélectivité naturelle des enzymes.