Un héros trop discret
De Gaulle, dans ses « Mémoires de guerre », évoquait une « juvénile fureur » pour qualifier l’assassinat de l’amiral Darlan, le 24 décembre 1942, à Alger, par Fernand Bonnier de la Chapelle, âgé de 20 ans. Bénédicte Vergez-Chaignon reprend cette expression pour le titre de son livre, qui se lit comme un roman policier. De courts chapitres, relevant moins de la biographie que du récit galopant, pour retracer la destinée de ce jeune idéaliste qui avait rejoint en Algérie son père, journaliste à La Dépêche algérienne. S’appuyant sur les archives familiales, la biographe de Pétain redonne chair à cette silhouette toujours réduite à son geste final. Complot gaulliste ? Anglais ? Vergez-Chaignon tranchepourl’intriguemonarchiste,orchestrée par Henri d’Astier de la Vigerie, secrétaire adjoint à l’Intérieur du Haut-Commissariat en Afrique du Nord, et le lieutenant abbé PierreMarie Cordier, confesseur de d’Astier. Darlan s’accrochait au pouvoir, ils avaient un candidat de la réconciliation, le comte de Paris : Bonnier, membre des corps francs d’Afrique, est l’arme qui se présente au bon moment. Manipulé comme Ravaillac, il affirmera avoir agi seul. Jugé en vingt-quatre heures, exécuté en quarante-huit, il ne bénéficiera de la grâce ni de Noguès, ni de Giraud, ni de Bergeret, l’autre personnage qu’on découvre dans ce livre attachant FRANÇOIS-GUILLAUME LORRAIN
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« Une juvénile fureur », de Bénédicte Vergez-Chaignon (Perrin, 440 p., 21 €).