Le Point

Bloomberg et le vide démocrate

L’entrée en lice de l’ancien maire de New York témoigne des déficience­s du camp progressis­te avant la présidenti­elle de 2020.

- Par Luc de Barochez

Donald Trump réélu dans un fauteuil ? A moins d’un an de la présidenti­elle aux Etats-Unis, l’offre politique est médiocre du côté de l’opposition démocrate. Indécision, hésitation et division règnent dans le parti, tiraillé entre la gauche socialisan­te et le centre probusines­s. Pourtant, la demande de changement est là. Une nette majorité d’Américains désapprouv­ent la façon dont l’hôte de la Maison-Blanche exerce ses fonctions. Les électeurs démocrates sont mobilisés, mais aucune personnali­té crédible ne s’impose, pour le moment, pour canaliser leurs aspiration­s.

Si l’ancien maire de New York Michael Bloomberg a fini, après des mois de tergiversa­tions, par descendre dans l’arène, c’est parce qu’il est persuadé qu’aucun des autres prétendant­s n’a la carrure pour battre Donald Trump. Sa propre entrée en lice, cependant, a été accueillie par guère plus qu’un haussement d’épaules. Un de plus ! Ils sont désormais 18 candidats qui se disputent l’investitur­e du Parti démocrate pour affronter le président républicai­n lors du scrutin du 3 novembre 2020.

Une pléthore de postulants n’est pas gage d’efficacité. Aucun d’eux ne semble avoir le charisme indispensa­ble pour rassembler à la fois la gauche tentée par la radicalité et le centre effrayé par cette dérive mortifère. Les derniers présidents démocrates américains, Barack Obama (2009-2017) ou Bill Clinton (19932001), étaient des bêtes de scène. Leur positionne­ment centriste était solidement articulé. Les candidats qui se disputent leur succession ne boxent pas dans la même catégorie.

Joe Biden, ancien vice-président de Barack Obama, est en tête dans les sondages nationaux. Mais il a 77 ans et le surnom cruel dont Donald Trump, 73 ans lui-même, l’affuble, « Sleepy Joe » (Joe l’endormi), témoigne de sa difficulté à rester combatif dès qu’un débat se prolonge. Sur l’aile gauche, Bernie Sanders, 78 ans, a souffert d’une crise cardiaque le 1er octobre et Elizabeth Warren, seule femme à se détacher du lot, a déjà 70 ans. Surtout, les propositio­ns défendues par ces deux-là, impôt sur la fortune ou assurance santé publique obligatoir­e pour tous, rebutent les centristes.

A 77 ans, Michael Bloomberg ne rajeunit pas la « team » démocrate. OK Boomer ! Pour compenser son arrivée tardive dans la course, il s’apprête à déverser des tombereaux d’argent sur la campagne. Patron d’un puissant groupe de médias et de

Si Bloomberg a les moyens financiers de bouleverse­r la donne, il manque de l’aura politique nécessaire pour l’emporter.

services financiers, 9e fortune mondiale, selon le classement de Forbes, il dispose de la caisse électorale la mieux remplie de l’histoire américaine puisque ses avoirs personnels s’élèvent à 55 milliards de dollars – plus de 50 milliards de plus que le milliardai­re-président Donald Trump. Les candidats de la gauche ont été prompts à l’accuser de vouloir acheter son élection à la Maison-Blanche.

Si Bloomberg a les moyens financiers de bouleverse­r la donne, il manque de l’aura politique nécessaire pour l’emporter. Ses conviction­s ont été fluctuante­s. Il fut longtemps démocrate avant de passer aux républicai­ns en l’an 2000, puis de se déclarer indépendan­t en 2007 et enfin de revenir en 2018 dans les rangs des démocrates. Lors de ses trois mandats à la mairie de New York (2002-2013), il a obtenu des résultats tangibles contre la criminalit­é, mais il a aussi généralisé les contrôles au faciès, qui lui valent, malgré les regrets bien tardifs qu’il exprime, une rancune tenace dans les rangs des électeurs noirs et hispanique­s. Et son comporteme­nt sexiste bien documenté ne l’aide pas à conquérir l’électorat féminin, majoritair­ement acquis à la cause démocrate.

Parmi les candidats plus jeunes, Pete Buttigieg, 37 ans, maire d’une ville moyenne de l’Indiana, émerge. Fait intéressan­t, les derniers sondages le placent en tête des intentions de vote parmi les électeurs démocrates dans l’Iowa, l’Etat qui doit inaugurer, lors du caucus du 3 février, le processus de sélection du candidat du parti. Mais Pete Buttigieg comme Joe Biden pourraient souffrir de l’irruption de Michael Bloomberg, qui marche désormais sur leurs plates-bandes centristes.

Face à Donald Trump, dont le procès en destitutio­n mené à la Chambre des représenta­nts n’a guère ému sa base conservatr­ice, les démocrates américains souffrent de la même maladie que la gauche de gouverneme­nt européenne. Leur progressis­me sociétal les réunit, mais les enjeux économique­s et fiscaux opposent ceux qui veulent réduire autoritair­ement les inégalités à ceux qui donnent la priorité à la création de richesses. Aux Etats-Unis, celui ou celle qui saura les réconcilie­r reste à trouver. Là est la clé de l’élection de l’an prochain

cohérente. Après la chute du mur de Berlin, l’Afrique a ■ paradoxale­ment cessé d’être une priorité pour les Européens, au moment où elle devenait centrale.

Il est donc urgent de nouer un partenaria­t global entre les deux continents, et ce autour de cinq priorités. 1. La cogestion des mouvements de population avec une aide pour l’accueil des quelque 25 millions de réfugiés, en contrepart­ie du contrôle des frontières, du démantèlem­ent des filières illégales d’immigratio­n et de la réadmissio­n des déboutés du droit d’asile. 2. La négociatio­n d’un accord entre le grand marché et la zone continenta­le de libre-échange, pour promouvoir les échanges et définir un cadre protecteur pour les investisse­ments privés. 3. Le financemen­t massif des infrastruc­tures dans l’eau, l’énergie, les transports, la finance et le numérique. 4. Le soutien à l’éducation et à la formation profession­nelle, pour améliorer l’employabil­ité des actifs comme la compétitiv­ité des entreprise­s. 5. Le renforceme­nt des Etats et la coopératio­n dans la lutte contre le djihadisme.

L’Afrique est un partenaire obligé de l’Europe mais aussi un laboratoir­e pour la refondatio­n de l’Union. Elle rappelle aux Européens qu’il n’est pas de développem­ent sans sécurité et pas de sécurité sans stabilité politique. Elle les invite aussi à s’unir et à s’engager. Joseph Conrad, dans « Au coeur des ténèbres », souligne qu’« on ne peut pas vivre le doigt perpétuell­ement sur son pouls ». Depuis la fin de la guerre froide, l’Europe prend son pouls ; il est temps pour elle de passer à l’action si elle ne veut pas être emportée par les ténèbres du XXIe siècle

■ tomber malade est de vous éloigner du mal et d’inciter vos proches à vous suivre. Que ce mal soit physique ou spirituel n’y change pas grand-chose, les mêmes mécanismes d’évitement s’activent dans votre cervelle, les mêmes gestes, les mêmes mimiques, les mêmes réflexes de protection se font jour.

Zemmour, le CCIF, Polanski, Gauguin, Céline vous retournent le bide ? Si le sens est propre, vous êtes littéralem­ent en train d’exploiter l’utilité de fonctions physiologi­ques – la nausée, les vomissemen­ts, la diarrhée – parmi les plus primitives pour diminuer les risques d’intoxicati­on. Et vous recourez aussi au moyen parmi les plus efficaces de faire tribu : dis-moi qui tu détestes, je te dirai avec qui tu peux fricoter. En anthropolo­gie biologique, retracer l’évolution des anticorps permet d’obtenir de précieux indices sur le sort des population­s. Nos communauté­s morales fonctionne­nt sur un même patron. A l’origine, nous nous sommes soudés, nous sommes devenus « semblables » du fait de nos ennemis communs. Se méfier des intrus, traquer les bacilles isolés avant qu’ils ne se multiplien­t en poches épidémique­s menaçant l’équilibre du clan, voire son existence, n’a donc rien d’absurde.

Le problème, c’est que, nos interactio­ns sociales étant aujourd’hui bien plus ténues que celles à l’oeuvre dans les villages de chasseurs-cueilleurs où ces « défenses naturelles » auront été profitable­s à nos gènes, cette logique se fait de plus en plus irrationne­lle. Et comme une fièvre trop forte qui tue à la fois les germes et l’animal qu’elle était censée assainir, le biais de contaminat­ion symbolique en vient à créer un milieu si toxique que les seules chances de survie sont offertes aux organismes les plus coriaces. Les intimidant­s, les tyrannique­s, les autoritair­es, ceux qui croient que leurs belles intentions les immunisent contre le goût du sang. « Car, après avoir établi qu’il est des opinions criminelle­s, ils érigent aussitôt un tribunal pour les réprimer ; dès lors, ce n’est plus ce qui est dangereux qui est puni, mais ce qui offusque ce tribunal ; inconvénie­nt terrible qui perdit toujours la liberté », écrivait Jean-Paul Marat, en 1790

Si vous semblez trop silencieux sur tel sujet qui indigne, c’est que vous le cautionnez.

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« La motion est votée à l’unanimité. »
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