Gramsci, Macron
ceux de tous peuvent changer le monde. Il y a pourtant ■ des limites. En tant qu’individu et en tant qu’entreprise, on peut faire quelque chose, mais, tant que l’Etat ne s’y mettra pas, on aura du mal. Autre chose importante : l’information. Comment savoir ce qui est éthique et ce qui ne l’est pas ? On est en train de faire des progrès là-dessus, mais il faut des critères, des mesures, des agences de notation fiables dans des domaines non financiers, et de la régulation… pour que vous soyez au moins sûr que, quand vous mettez vos économies ou vos achats dans quelque chose présenté comme « vert », c’est effectivement vert.
Pourquoi vivez-vous toujours en France?
Un des drames de l’Europe est que trop de cerveaux, parmi les meilleurs chercheurs et entrepreneurs, partent à l’étranger. Un exemple parmi tant d’autres est celui du Prix Nobel Esther Duflo, qui est au MIT, près de Boston. Aujourd’hui, ils sont en Grande-Bretagne, en Suisse et surtout aux EtatsUnis ; demain, ils seront aussi à Singapour ou en Chine. Je comprends ceux qui s’expatrient pour trouver de meilleures conditions de recherche et de travail, et j’en ai moi-même profité au MIT, où j’étais très heureux… Mais, si tout le
« Il y a une double défaillance : celle du marché et celle de l’Etat, qui ne veut pas corriger le marché. Donc, qu’est-ce qu’il reste ? Nous, pour réagir. »
monde fait ça, c’est collectivement dramatique. Je l’ai vu en Grèce : en 2011-2012, je discutais avec les étudiants et j’étais triste parce qu’ils me disaient tous qu’ils voulaient partir à l’étranger. Et, quand je leur demandais s’ils reviendraient, ils répondaient non. J’ai décidé de rentrer en France, à Toulouse, pour des raisons entrepreneuriales. Quand JeanJacques Laffont et quelques amis ont, à leur petite échelle, voulu changer l’université, je me suis dit que c’était le moment ou jamais de faire quelque chose pour mon pays. C’était il y a vingt-huit ans, et je suis toujours ici. Nous devons nous battre pour que l’emploi et la richesse soient créés dans notre pays, et pour que les étudiants et les décideurs puissent bénéficier d’une palette plus large de formations et de transferts de connaissances. C’est ma motivation et celle de mes collègues ; nous avons une responsabilité sociale collective
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