Le Point

La règle qui renforce les syndicats

- BEATRICE PARRINO

Laurent Berger, leader de la CFDT, nous représente-t-il ? Et son acolyte de la CGT, Philippe Martinez, doit-il parler pour nous ? Sur les plateaux télé, à la radio, on se les arrache… Mais pour quelles raisons leur donne-t-on la parole ? Officielle­ment, avec FO, la CFTC et la CFE-CGC, ce sont les partenaire­s sociaux du pouvoir. Les cinq syndicats ont pour mission de défendre les travailleu­rs et leurs droits. Parfois, ils sont conviés à des négociatio­ns, qui impliquent de leur part une éventuelle signature officielle du texte négocié avec le patronat, et parfois, ils participen­t à une concertati­on. C’est alors que le pouvoir les reçoit pour recueillir leurs opinions, mais il n’est pas contraint de tenir compte de leurs avis. C’est le cas sur le sujet des retraites. Mieux vaut les embarquer, car ils savent mettre la pression en passant par la grève ou les manifestat­ions, comme ces derniers jours. La puissance des syndicats est définie, entre autres, par la loi de 2008 sur la représenta­tivité syndicale. Dans le privé, la CFDT a une audience de 26,39 %, la CGT de 24,85 %, FO de 15,60 %, CFE-CGC de 10,69 % et la CFTC de 9,48 %. Vous le remarquere­z, le total ne fait pas 100 %, car ont été exclus les syndicats enregistra­nt un score de moins de 8 %. C’est ainsi que, par la magie de la loi, les 5 syndicats qui dépassent ce seuil se voient redistribu­er des voix en quelque sorte, et prennent du poids : la CFDT affiche 30,33 %, la CGT 28,56 %… Donc la CFDT représente­rait plus de 3 travailleu­rs sur 10. Dans les faits, 1,4 million de Français dans le privé (sur plus de 19 millions d’actifs) ont voté pour elle. Soit 7,3 % de la population active dans ce secteur ! Pour la CGT, on est à 6,8 %. Notons que ces scores sont calculés à partir des résultats des élections profession­nelles dans les entreprise­s. La loi prévoit que seuls les syndicats peuvent présenter des listes au premier tour pour permettre le calcul de leur représenta­tivité. Ce qui crée une désaffecti­on des travailleu­rs qui, pour certains, refusent de se rendre aux urnes. D’autres votent au premier tour, ne sachant pas forcément qu’en votant pour leurs collègues, ils apportent une voix à une organisati­on syndicale. Qui s’y accrochera pour faire la tournée des plateaux télé…

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