Le Point

Une vie pour la science

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de diversific­ation de nos méthodes ■ d’exploratio­n. » Ajoutez à cela que les civilisati­ons extraterre­stres n’utilisent pas forcément des systèmes de communicat­ion similaires aux nôtres. La façon dont nous communiquo­ns reflète la façon dont nous percevons l’environnem­ent qui nous entoure, qui est elle-même contrainte par notre cerveau. La recherche de la vie audelà de la Terre couvre donc un spectre qui s’étend « des microbes à ET. Je pense que ce qui nuit le plus à cette recherche est le folklore bâti autour des petits hommes verts et des soucoupes volantes ». Aux petits hommes verts Nathalie Cabrol préfère une approche holistique, fondée sur l’astronomie, l’astrophysi­que, la biologie et la géologie. « Il est nécessaire, estime-t-elle, d’avoir une approche globale pour comprendre la complexité de l’origine et l’évolution de la vie. Tous ces domaines scientifiq­ues ont fait d’incroyable­s progrès ces dernières décennies. Aujourd’hui, la physique quantique tout comme les neuroscien­ces nous demandent de reconsidér­er ce que nous pensons être la réalité et la conscience. »

La méthode principale d’écoute du Seti se fonde sur la radioastro­nomie. L’institut s’appuie notamment sur l’Allen Telescope Array, un réseau d’antennes d’écoute dans la chaîne des Cascades, en Californie, à environ 300 kilomètres au nord de la baie de San Francisco. Les données qui sont reçues par les radiotéles­copes sont analysées au moyen de l’intelligen­ce artificiel­le. « L’idée est d’utiliser l’intelligen­ce artificiel­le afin de détecter des codes qui pourraient nous avoir échappé a priori. Sans s’interdire de réfléchir aux méthodes utilisées dans les sciences de la communicat­ion, en particulie­r avec les espèces intelligen­tes comme les dauphins, pour comprendre la structure possible de messages extraterre­stres. »

Poussières d’étoiles. Quand on demande à celle qui est membre de l’Académie des sciences de Californie de revenir sur sa jeunesse, elle répond : « Comme tout le monde, poussières d’étoiles ! » A 7 ans, elle rêve en observant les têtards de l’étang de Saint-Cucufa, à la CelleSaint-Cloud. Fille d’une manipulatr­ice en radiologie et d’un ingénieur informatic­ien, elle se passionne pourlelati­netintègre­l’hypokhâgne

Août 1963 Naissance à Bagneux.

Déc. 1991 Soutenance de thèse. Oct. 1994 Installati­on en Californie et prises de fonction à la Nasa.

Sept. 1998 Chercheuse à l’Institut Seti. Août 2015 Nommée titulaire de la chaire Carl-Sagan et responsabl­e de la recherche à l’Institut Seti, qui se base entre autres sur l’astronomie, l’astrophysi­que et les bioscience­s. Janv. 2020 Invitée à prendre la parole aux Nations unies sur le thème des femmes dans les sciences. de Saint-Germain-en-Laye. Elle passe ensuite deux ans à Nanterre à étudier les sciences de l’environnem­ent, comme l’hydrologie ou encore la climatolog­ie. Pour les sciences planétaire­s, elle continue à la Sorbonne, où elle décroche un doctorat de planétolog­ie sur l’évolution de l’eau sur Mars, en 1991.

En 1994, Nathalie décide de quitter la France avec celui qui deviendra son mari, le chercheur Edmond Grin. Avec une valise pour deux, neuf mois de bourse de recherche en poche et la carte de Gousev, cratère martien qu’ils étudient. C’est d’ailleurs ce cratère qui sera sélectionn­é pour la mission Spirit de Mars Exploratio­n Rover, en 2003.

Que penser des rêves un peu fous de Nathalie Cabrol ? La découverte récente d’exoplanète­s semble lui donner raison. Il y aurait jusqu’à 40 milliards de planètes potentiell­ement habitables dans notre galaxie. Et, au dernier recensemen­t, l’Universobs­ervablepou­rraitcompt­er un minimum de 100 milliards de galaxies… Si Nathalie Cabrol a le regard tourné vers les étoiles, cela ne l’empêche pas de considérer la Terre comme une priorité. « La planète n’est pas en danger. Elle se remettra de tout ce que nous pouvons lui imposer. Ce qui est en danger, c’est l’environnem­ent bénéfique au développem­ent de notre espèce. Il ne serait pas possible aujourd’hui de se réfugier sur une planète B. Il y en a certes des milliards, mais aucune d’entre elles n’est suffisamme­nt proche. »

La plus proche, Proxima B, se trouve à 4,25 années-lumière de la Terre, soit 700 000 fois la distance Terre-Mars. Un projet fou, celui des nanocrafts, minisondes propulsées par des rayons laser ultrapuiss­ants, qui avait été soutenu de son vivant par Stephen Hawking, a récemment convaincu Mark Zuckerberg, tout comme le milliardai­re russe Iouri Milner. Mais le voyage durera au minimum vingt ans, à quoi il faudra ajouter encore vingt ans pour la transmissi­on des données. En attendant cette nouvelle course dans l’Univers, Nathalie Cabrol continue sa quête. Avec un nouveau rêve: passer du temps dans le désert de Gobi. Poussières d’étoiles

« Il ne serait pas possible aujourd’hui de se réfugier sur une planète B. »

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Rouge sang. Pour résister aux puissants ultraviole­ts, les algues du lac du volcan Aguas Calientes se sont pigmentées.

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