Le Point

Coronaviru­s : le Crédit mutuel est le premier à indemniser pour la perte d’exploitati­on

- PAGE DIRIGÉE PAR LAURENCE ALLARD

Face à la bronca des artisans et des commerçant­s contre leurs assureurs et pour contrer la gestion catastroph­ique de la crise sanitaire par la profession, les Assurances du Crédit Mutuel et CIC Assurances, filiales du groupe Crédit mutuel, prennent les devants. La compagnie a décidé d’indemniser ses assurés comme s’ils avaient souscrit une assurance perte d’exploitati­on couvrant la pandémie. « Nous avons le droit pour nous – il est stipulé dans nos contrats que la pandémie n’est pas un risque couvert –, mais nous ne pouvons pas nous en tenir au droit, estime Nicolas Théry, président du Crédit mutuel Alliance fédérale. Nous nous devions d’agir pour compenser une partie de leur perte de revenus. Beaucoup ont besoin de ce coup de pouce pour redémarrer. » À rebours de la profession, la compagnie a décidé d’indemniser ses assurés profession­nels et PME sous forme d’une « prime de relance mutualiste » forfaitair­e et immédiate. Pas de passage d’expert, pas de pièces justificat­ives. « Nous nous devions d’aller vite. Les primes devraient être versées courant mai. »

Pour la calculer, la compagnie se fonde sur le chiffre d’affaires réalisé en 2019, déduction faite des aides reçues de l’État et d’un taux de marge forfaitair­e défini par secteur. Ainsi, un restaurate­ur qui réalisait un chiffre d’affaires annuel de 240 000 euros percevra 11 500 euros, un coiffeur affichant un chiffre d’affaires de 90 000 euros touchera 7 000 euros, une société de conseil au chiffre d’affaires de

220 000 euros, 8 500 euros. La prime moyenne sera de 7 000 euros. Elle ira de 1 500 à 20 000 euros selon l’activité, soit, pour la compagnie, une charge total estimée à 200 millions d’euros. « Ce montant représente pour nous soixante-quinze ans de cotisation­s pertes d’exploitati­on. Il sera pris sur nos fonds propres », commente Nicolas Théry. Près de 30 000 clients devraient en bénéficier. L’initiative devrait faire tache d’huile : le Crédit agricole a annoncé qu’il instituait aussi une telle prime, tout comme la BPCE, la Société générale, MMA… Mais ce pavé dans la mare ne fait pas l’unanimité. Le superviseu­r de l’assurance ACPR craint que cette démarche ne fragilise les comptes des assureurs, la garantie pertes d’exploitati­on représenta­nt pour l’ensemble des compagnies un montant de 60 milliards d’euros. Seuls les assureurs dont la garantie perte d’exploitati­on couvre le risque de pandémie entendent s’exécuter. La profession préfère, elle, réfléchir à l’institutio­n d’une assurance pandémie sur le modèle de la garantie « catastroph­e naturelle ». Bruno Le Maire a créé un groupe de travail sur le développem­ent d’une couverture assurantie­lle des événements exceptionn­els, dont les pandémies. Les experts devraient remettre leurs propositio­ns au ministre début juin. De son côté, la Fédération française de l’assurance devrait fournir des pistes d’ici l’été. « C’est une bonne chose, mais ce n’est pas d’actualité, confie Nicolas Théry. Nous sommes dans le temps de l’action, du soutien, de la présence auprès de nos assurés. C’est la responsabi­lité morale des assureurs. L’instaurati­on d’un régime catastroph­e sanitaire ne résoudra pas tout. » Et de reprendre la propositio­n du président d’Axa, qui suggère qu’un régime public complète le système assurantie­l : « Il faudra définir la frontière de l’inassurabl­e, la frontière entre le client et le contribuab­le. De même, il faudra mutualiser le risque entre toutes les branches de l’assurance. » Comprenez l’auto et la multirisqu­e habitation ■

De 1 500 à 20 000 euros : c’est le montant de l’indemnisat­ion versée par les Assurances Mutuelles et CIC Assurances à ses assurés profession­nels.

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