Éditoriaux : Luc de Barochez, Pierre-Antoine Delhommais, Nicolas Baverez
Le Parti de Xi Jinping prétend construire un système international accommodant pour les pouvoirs autoritaires, au détriment de nos libertés.
Le coronavirus, n’en déplaise à Donald Trump, n’a jamais été chinois. Il n’a ni nationalité ni couleur de peau. Il est passé en novembre 2019, dans des conditions qui un jour peut-être seront éclaircies, d’un animal à un être humain. En jouant à saute-frontières, il s’est répandu en moins de six mois à travers le monde, et l’épidémie de Covid-19 avec lui. Il est devenu français, européen, américain, africain, asiatique… au moins autant que chinois.
Nonobstant, il est bel et bien un virus communiste. Autant il est injuste de désigner à la vindicte publique des personnes qui se font les relais involontaires de la maladie, autant il est utile d’établir les responsabilités politiques dans la naissance puis la propagation d’une épidémie qui a fait plus de 200 000 morts et qui a mis à terre l’économie mondiale.
Le Parti communiste chinois (PCC), dirigé depuis 2012 par Xi Jinping (lire aussi p. 30), porte une triple responsabilité dans l’enchaînement fatal des événements. Il a d’abord favorisé le départ de l’épidémie en s’abstenant de réglementer la promiscuité entre humains et animaux sur les marchés et en laissant faire le commerce d’animaux sauvages vivants, alors même qu’une première épidémie de coronavirus, en 2002-2003, avait démontré l’extrême dangerosité de ces pratiques.
Le Parti a ensuite encouragé la propagation silencieuse de l’épidémie en étouffant l’information sur la maladie, en niant, encore en janvier, qu’elle se transmette entre humains, puis en réprimant les lanceurs d’alerte de Wuhan, tel l’héroïque Dr Li Wenliang, qui est décédé depuis du Covid-19. Dans un régime communiste fondé sur la peur, les autorités locales ont préféré nier la réalité pendant des semaines plutôt que de sonner l’alerte sur la crise sanitaire en cours (lire aussi p. 36). Leur bilan de victimes reste sujet à caution.
Le PCC a enfin affaibli la coopération mondiale contre le virus en se livrant ces derniers mois, en particulier sur Internet, à une campagne de désinformation visant à se défausser de ses responsabilités, allant jusqu’à prétendre que le virus pourrait avoir été fabriqué par les États-Unis.
La Chine contemporaine est un monde post-orwellien où le Parti communiste contrôle toute la vie politique, économique, sociale, culturelle et médiatique. L’épidémie de Covid-19 témoigne des dommages que peut causer un modèle de gouvernance autoritaire qui ne laisse aucune place à l’initiative individuelle, à la responsabilité des citoyens, à la transparence, à la liberté d’informer. Même le masque chirurgical, que les gouvernements imposent de plus en plus à leur population, pourrait bien être une
Dans un régime communiste fondé sur la peur, les autorités locales ont préféré nier la réalité plutôt que de sonner l’alerte.
métaphore de la liberté d’expression refusée aux citoyens chinois et menaçant de l’être bientôt pour d’autres peuples.
Car sous l’impulsion de Xi Jinping qui, tel Mao ou Staline, a concentré l’essentiel du pouvoir dans ses mains, le Parti communiste chinois n’a pas seulement recours à des méthodes de contrôle social de plus en plus élaborées pour asservir sa population et réprimer les minorités. Il a aussi la volonté d’exporter son modèle, en oeuvrant à construire un système international qui soit plus favorable aux régimes autoritaires et, sous couvert de « nouvelles routes de la soie », d’étendre à travers le monde son influence délétère pour les libertés.
Il poursuit une politique expansionniste agressive, caractérisée par la militarisation de la mer de Chine du Sud, au détriment de ses voisins asiatiques, et par un mercantilisme prédateur en Europe et ailleurs. Le PCC est devenu un défi systémique pour l’Occident. Donald Trump attise cette ambiance de nouvelle guerre froide, convaincu qu’il est que faire campagne contre Pékin pourrait améliorer ses chances de réélection cette année, après la complaisance dont firent preuve ses prédécesseurs visà-vis des dirigeants chinois.
Fidèles aux principes de Montesquieu (« Là où il y a des moeurs douces, il y a du commerce et là où il y a du commerce, il y a des moeurs douces »), les Occidentaux ont longtemps cru que la mondialisation économique allait permettre au régime chinois de se libéraliser et de se démocratiser. Quelle erreur !
Sous la férule de Xi, le Parti communiste a au contraire effectué un grand bond en arrière, revenant sur les réformes qui avaient été consenties précédemment. Sa gestion maladroite de la pandémie vient cependant fragiliser ses ambitions mondiales. Et elle pose une question clé : à partir de quel moment les institutions politiques internes d’un pays représentent-elles une menace pour le reste du monde ?
■
faut-il y voir une preuve scientifique supplémentaire des ■ troubles neurologiques que le Covid-19 cause chez certains malades. Au rythme où gagne la folie collective, il n'est pas exclu qu'on entende bientôt des ministres prôner une réorganisation de notre agriculture en kolkhozes au prétexte ne plus dépendre des importations de spaghettis venus d'Italie.
Cette soviétisation de l'économie française, à laquelle nombre de nos dirigeants semblent aujourd'hui aspirer, marquerait en vérité moins une rupture qu'une forme de continuité pour un pays qui détenait déjà, avant le début de la pandémie, le record mondial des dépenses publiques et sociales et présentait un niveau inégalé de pression fiscale. Le Covid-19 risque bien au final de faire glisser économiquement la France d'un socialisme larvé vers un communisme ouvertement assumé, avec Emmanuel Macron en improbable chef du Gosplan
■